La Religieuse et la théorie du « narrateur indigne de confiance »

Marc Hersant

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Marc Hersant, « La Religieuse et la théorie du « narrateur indigne de confiance » », Tropics [En ligne], 12 | 2022, mis en ligne le 01 décembre 2022, consulté le 21 novembre 2024. URL : https://tropics.univ-reunion.fr/2123

La théorie du narrateur indigne de confiance, élaborée par Wayne Booth dans un ouvrage paru au début des années 1960, semble, au vu de l’écart important qu’on peut observer entre les convictions philosophiques du philosophe et les croyances de sa narratrice, pouvoir trouver dans La Religieuse un cas d’école. On tente ici de montrer que son application au roman de Diderot n’est pas moins en contradiction avec l’expérience commune de lecture qu’il a suscitée historiquement et avec le discours tenu par l’auteur sur son œuvre.

The theory of the unreliable narrator, developed by Wayne Booth in a book published in the early 1960s, seems, in view of the significant gap that can be observed between the philosophical convictions of the philosopher and the beliefs of his narrator, to be able find in La Religieuse a textbook case. We try here to show that its application to Diderot's novel is no less in contradiction with the common experience of reading that it has historically aroused and with the discourse held by the author on his work.

Le roman à la première personne, tel qu’il s’impose comme une forme majeure de la fiction narrative au XVIIIe siècle, semble reposer sur un paradoxe : d’une part, le fait que le personnage lui-même prenne la parole, rendant invisible ou cryptée la présence de l’auteur1, peut susciter une expérience d’immersion fictionnelle particulièrement forte, et une relation émotionnelle intense d’identification du lecteur au sujet d’énonciation fictif qui lui raconte son histoire (dans le cas du roman-Mémoires2) ou rend compte au fur et à mesure de ce qu’il vit (dans le cas d’un roman épistolaire s’apparentant presque dans certaines de ses parties à un journal intime comme dans le cas de Pamela) ; d’autre part, ce narrateur fictif rend possible une attitude critique sur la fiabilité de la version qu’il donne des événements qu’il raconte, et sur sa propre fiabilité comme sujet d’énonciation prétendant tenir un discours de vérité. Cette suspicion, il faut le rappeler, touche aussi les « vrais » Mémoires, ce que remarquent tous les commentateurs du temps. Dans le Dictionnaire de Furetière, on trouve déjà cette mention qui traduit un scepticisme répandu : « Ceux qui publient des mémoires, au lieu de s’entretenir avec eux-mêmes, entretiennent le public des bonnes qualités qu’ils croient avoir, ou des belles actions qu’ils prétendent avoir faites »3. Plus précisément, l’article « Mémoires » de l’Encyclopédie constate qu’« Il y a contre tous les écrits en ce genre une prévention générale, qu’il est très-difficile de déraciner de l’esprit des lecteurs, c’est que les auteurs de ces mémoires, obligés de parler d’eux-mêmes presqu’à chaque page, aient assez dépouillé l’amour-propre et les autres intérêts personnels pour ne jamais altérer la vérité ; car il arrive que dans des mémoires contemporains partis de diverses mains, on rencontre souvent des faits et des sentiments absolument contradictoires »4 et l’on trouve des considérations similaires, plus développées, dans l’article « Mémoires » des plus tardifs Éléments de littérature de Marmontel. Les « vrais » Mémoires ont donc en quelque sorte habitué les lecteurs du temps à se méfier des récits à la première personne, et cette attitude de méfiance a priori semble pouvoir glisser insensiblement de la relation du lecteur à un auteur « réel », dont il ne prend pas tout ce qu’il dit pour argent comptant, à celle qu’il entretient à un narrateur fictif. Une différence subsiste évidemment : le vrai mémorialiste ne cherche pas à attirer le soupçon, alors que le romancier travaille à rendre suspect, dans les cas concernés, le narrateur dont il est le créateur. Dans le premier cas les indices sont lâchés de manière involontaire, dans le second ils sont le résultat de la réflexion de l’écrivain sur la manière dont il construit son double postiche.

Mais pour revenir à cette espèce d’hésitation structurelle entre immersion et distance, certains romans semblent, en première approximation, faire davantage pencher la balance du premier côté, même si ce n’est pas forcément sans reste : c’est par exemple le cas pour la narratrice-épistolière déjà mentionnée de la Pamela de Richardson, qui a bouleversé des générations de lecteurs, à commencer par Diderot lui-même, mais qui n’est pas toujours exempte de contradictions qui rendent son discours occasionnellement un peu suspect, par exemple sur la nature exacte des sentiments qu’elle entretient pour celui qui est, dans la première moitié du roman, son bourreau et son potentiel violeur, avant de devenir, dans la seconde, son mari et un parangon de vertu masculine. D’autres narrateurs créés par les romanciers du XVIIIe siècle semblent en revanche des cas d’école pour l’étude de la théorie du narrateur indigne de confiance, Prévost proposant sans doute certains des narrateurs les plus retors de toute la littérature romanesque du siècle, dans Le Doyen de Killerine et l’Histoire d’une grecque moderne notamment, ce qui n’empêche évidemment pas le lecteur, dont l’attitude n'est pas forcément programmée par le texte de manière simpliste et univoque, de vivre en alternance ‒ éventuellement ‒ un élan compassionnel et une prise de distance, et de souffrir occasionnellement avec le personnage tout en cultivant à son endroit une certaine lucidité critique.

On pourrait cependant soutenir qu’aucun roman n’a, du point de vue qu’on envisage ici, été tiré dans les deux sens de manière aussi déconcertante que La Religieuse. La lecture spontanée de ce roman a donné lieu à de nombreux témoignages de violente émotion et d’identification quasi hallucinatoire au personnage, tout à fait comparables à ce que décrit à propos de lui-même Diderot lisant Richardson : c’est vrai pour la plupart des premiers lecteurs historiques du roman, vrai aussi de la plupart des lecteurs actuels. De manière significative, Nicolas Rousseau dédie son étude de Diderot romancier à sa mère, en écrivant ceci : « À la mémoire de ma mère, qui avait compati5 aux malheurs de Suzanne Simonin »6. La mère du critique est donnée comme le modèle d’une lecture émotive avec laquelle le spécialiste ne semble pas vouloir rompre entièrement, comme s’il craignait que la lecture académique ne puisse s’égarer à trahir la lecture spontanée et à lui donner tort. Et de fait, aucun roman n’a suscité un écart aussi important entre le discours des lecteurs ordinaires qui croient, à tort ou à raison, leur émotion légitime et celui des experts qui ont souvent, au contraire et volontiers souligné les zones troubles de la narration et le caractère manipulateur voire pervers du récit de Suzanne : c’est peut-être Christophe Martin qui est allé le plus loin dans cette direction, dans un petit livre de référence sur le roman de Diderot, où il n’hésite pas à parler de notre narratrice comme d’une « séductrice perverse »7, utilise à plusieurs reprises le mot de « monstruosité »8 pour la désigner et va jusqu’à affirmer, sans doute avec une pointe d’humour et de provocation, qu’il « y a de la sérialité criminelle »9 dans son itinéraire. Ces affirmations ont notamment pour origine, du côté de la fiction, l’indifférence obstinée affichée par la narratrice en matière de sexualité, qui est donc ici fortement « psychologisée », et du côté de la critique une analyse de la cohérence psychique censée lui être attribuée par le romancier. Cette lecture tout en finesse aborde donc La Religieuse en utilisant des outils critiques qui ont démontré leur pertinence pour l’analyse des romans de Prévost cités plus haut, et en faisant du soupçon presque systématique vis-à-vis de la narratrice une clé de lecture du roman. Elle n'est d’ailleurs pas sans produire des moments d’hésitation, le commentateur terminant son analyse du discours de la narratrice indigne de confiance qu’il a tenté d’observer en se demandant s’il ne vaut pas mieux, malgré tout, « prendre l’innocence de Suzanne à la lettre »10.

Rappelons que le « narrateur indigne de confiance » a été pensé, sur le plan théorique, par Wayne Booth dans son ouvrage The Rhetoric of fiction en 1961. À l’époque où il a construit cette notion célèbre, Booth ne pensait pas qu’elle pouvait s’appliquer à tous les narrateurs des récits de fiction à la première personne : il estime que le narrateur est « digne de confiance quand il parle ou agit en accord avec les valeurs de l’œuvre » et avec les « normes implicites de l’auteur »11, qu’il est indigne de confiance dans le cas contraire, c’est-à-dire quand un soupçon d’écart entre les valeurs de l’auteur et celles du narrateur est légitimé par une multitude de signaux épars dans le texte. Un cas de figure idéal serait la mise en scène par un auteur militant contre le racisme d’un narrateur raciste. Cependant, la tendance ultérieure d’une partie de la critique a été de juger que cet écart va de soi dans tous les cas, et qu’au fond aucun narrateur fictif n’est « fiable » à proprement parler : dans cette optique, Dorrit Cohn, dans Le Propre de la fiction, s’est attaquée à un écrivain, Proust, qui a souvent suscité une lecture jugée naïve de confusion presque totale entre narrateur et auteur, notamment au sujet des parties dissertatives du Temps retrouvé, pour suggérer la possibilité de lire de manière ironique ou au moins distanciée, non comme un essai de Proust incrusté dans l’œuvre, mais au contraire comme le produit d’un narrateur indigne de confiance, ces fameuses méditations sur l’art et la littérature12. Une telle forteresse énonciative une fois prise d’assaut, quel narrateur fictif pourrait bien résister ?

En outre, Suzanne Simonin semble correspondre idéalement à ce que dit Booth du « unreliable narrator » en ce qui concerne l’écart des valeurs (et des croyances) entre instance d’énonciation réelle et instance d’énonciation fictive. Diderot est matérialiste et athée, sa narratrice ne cesse d’affirmer la foi chrétienne – et catholique – la plus évidemment sincère. En ce qui concerne les institutions religieuses, Suzanne n’attaque que rarement l’existence même des couvents ‒ quand elle le fait, on a parfois émis l’hypothèse que Diderot s’oublie et parle en son propre nom ‒ mais les dérives liées aux vœux forcés, dans une logique que justifie pleinement l’indignation de bien des prêtres catholiques sous l’Ancien Régime face à des vocations factices qui n’ont pas été appelées par Dieu. Elle respecte les représentants de l’Église, et plusieurs figures ecclésiastiques dans le roman ont une image plutôt ou franchement positive, en particulier plusieurs figures masculines de prêtres qui viennent rétablir l’ordre à Longchamp ou mettre en garde Suzanne sur la vertu de la supérieure de Sainte-Eutrope. Suzanne vénère les textes sacrés et à plusieurs reprises la lecture du Nouveau Testament en particulier est présentée comme un refuge pour elle, une consolation, alors qu’elle est confrontée à la violence des persécutions : une de ces persécutions est précisément de lui en interdire l’accès. Le texte va si loin dans cette direction qu’il a suscité une célèbre lecture « chrétienne » du roman par Georges May13, qui a été l’objet de quelques concessions avant d’être discutée pour le fond par Robert Mauzi dans la préface de son édition14 ou par Christophe Martin dans son étude du roman15. Les textes de Diderot sont parfois (ce n’est pas une obsession comme chez Voltaire, Meslier ou d’Holbach) impitoyables avec les textes sacrés, présentés dès les Pensées philosophiques comme une « simple production de l’esprit humain »16 qui n’atteint même pas à la qualité d’œuvres très humaines comme celles de Tite-Live ou de Salluste : ce n’est pas un hasard si c’est à des historiens qu’ils sont comparés, car c’est évidemment leur valeur de vérité qui est en question. Suzanne croit aux rituels de l’Église catholique que Diderot tourne en dérision presque aussi souvent que Voltaire. Suzanne croit à la substance spirituelle, l’âme, et naturellement à Dieu, alors que le philosophe Diderot, dans les textes où il exprime le fond de sa pensée, attribue sensibilité et pensée à la matière elle-même, et l’ordre que nous admirons dans la nature au résultat d’un long tâtonnement d’une matière fonctionnant en quelque sorte par essais et erreurs. Un passage particulièrement important du roman va en outre jusqu’à faire de Suzanne une adversaire des philosophes, qui semblerait du coup attaquer Diderot en personne : au paroxysme des persécutions qu’elle endure sous la domination de Sainte-Christine, Suzanne se console en pensant à la souffrance de Jésus et fait cette intéressante remarque : « Ce fut alors que je sentis la supériorité de la religion chrétienne sur toutes les religions du monde ; quelle profonde sagesse il y avait dans ce que l’aveugle philosophie17 appelle la folie de la croix »18. Autant de raisons de se méfier de Suzanne a priori19.

Cet effet de décalage, pour être bien compris, doit cependant être comparé à un procédé typique des Lumières, qui consiste précisément, dans une perspective polémique, à donner la parole à l’ennemi : Philippe de Marnix de Sainte-Aldegonde, écrivain protestant récemment étudié par Mathieu de La Gorce20, avait donné au XVIe siècle un exemple monumental de ce procédé en donnant longuement la parole à un énonciateur catholique fanatique ne cessant de se discréditer par la violence et l’absurdité de ses positions. Au XVIIIe siècle, Voltaire affectionne le procédé, et l’utilise dans des pamphlets de brève dimension comme l’archétypique De l’horrible danger de la lecture, qui met en scène la voix fictive d’un énonciateur musulman fanatique dont chaque mot confirme la bêtise et la malignité, à supposer qu’on puisse attribuer à une énonciation aussi criblée d’incohérence une quelconque stabilité. Cette manière de mettre en scène une voix que l’on discrédite tout en la produisant sur la scène énonciative est un procédé comique. L’énonciateur ainsi créé est évidemment indigne de confiance, et il l’est de manière caricaturale. Je ne pense pas que la caractérisation de La Religieuse comme œuvre comique entraîne beaucoup l’adhésion, même des critiques les plus amateurs de paradoxes, et qu’on puisse lire le roman de Diderot en suivant le même mode d’emploi. On ne peut d’ailleurs pas confondre cette manière de mettre la voix fictive à distance avec ce qu’on observe, par exemple, dans l’Histoire d’une grecque moderne, mais il y a au moins ceci de partiellement comparable que les deux textes reposent sur la confiance accordée a priori à l’intelligence d’un lecteur susceptible de repérer les indices qui l’amènent plus ou moins vite (au bout de deux lignes et avec un grand éclat de rire dans le cas du pamphlet de Voltaire, au bout de quelques pages et à la faveur de signaux beaucoup plus discrets dans le cas du roman de Prévost) à se méfier du personnage-énonciateur. D’une manière en partie similaire, même s’il est difficile de penser une poétique commune à Prévost et Marivaux dans l’ordre du roman-Mémoires, le lecteur peut construire une distance affectueuse à l’égard de la merveilleuse narratrice de La Vie de Marianne, ici encore sur la base d’indices ténus et subtils – indices quand même ‒ qui guident le lecteur sur cette voie.

La question est donc de savoir si La Religieuse génère, comme effet de lecture majeur, une telle attention de l’intelligence à ce qui met en défaut la narratrice. Or, on pourrait soutenir que le texte de Diderot, au contraire, vise à désarmer le lecteur de ce point de vue, à forcer ses défenses, et à l’emporter dans un flux émotionnel presque comparable à un rêve, dans la mesure où, dans un rêve, toute prise de distance à l’égard de ce que l’on vit paraît impossible. Certes, la Préface-annexe vient rétablir, dans un second temps, un moment critique, mais toujours associé à la question de la création fictionnelle envisagée pour elle-même, jamais à celle de la crédibilité de la voix narrative – question qui n’y est absolument pas posée. Et ce temps de la distance succédant au temps de l’identification ne vise absolument pas à mettre en question la pertinence de la seconde, qui est au contraire constamment présentée comme associée au processus créatif lui-même. Un article de Nicholas Paige de 201121 un peu fâché avec les tics d’une lecture « moderniste » du roman de Diderot valorisant tout ce qui en ferait une construction métafictionnelle plutôt qu’une expérience d’immersion romanesque, le remarquait déjà : il souligne qu’une espèce de doxa s’est constituée autour de l’idée que « la Préface-annexe […] importe précisément parce qu’elle permet de tenir à distance le pathos22 du texte principal »23 et que cette lecture dominante « a été motivée par des déterminations tout à fait étrangères aux préoccupations de Diderot lui-même », la volonté tenace – ce qui montre que Paige a lui aussi repéré le grand écart entre lecture spontanée et lecture savante qui touche ce roman – de « maintenir la "distance critique" protégeant les experts du brouillard émotionnel ou idéologique qui égare les lecteurs ordinaires »24. Il remarque ensuite, et c’est le sujet sur lequel je veux revenir, que rien dans la Préface-annexe ne vient véritablement justifier cette lecture, et encore moins une lecture du récit principal comme production, non de la victime innocente d’une terrible machine à broyer les vies, mais d’une manipulatrice et d’une intrigante déployant sa rhétorique compassionnelle pour parvenir à ses fins. D’où la mise en scène d’un Diderot bouleversé par le texte qu’il est en train d’écrire et se « désolant » de son conte : on ne voit pas d’où pourrait venir ce sentiment, sinon d’une participation intense de l’écrivain au martyre de sa créature de papier, à une très violente relation d’identification donc. Cependant, la principale préoccupation de Nicholas Paige n’est pas la narratrice, mais la démarche créatrice de l’auteur, et plus exactement il cherche à remettre à sa (juste ?) place la « Préface-annexe », et à contester la manière dont on l’a utilisée pour tirer l’œuvre de Diderot de manière excessive – car il n’est pas question de nier la pertinence relative de cette approche ‒ vers la métafiction.

Revenons donc à Suzanne comme instance d’énonciation d’un récit autobiographique dont le sujet est la révolte existentielle d’un être humain entrainé de force dans un destin dont il ne veut pas : ce « Non » qu’elle prononce au moment de la première cérémonie de vœux, et qui résonne dans l’œuvre tout entière. Ce qui intéresse Diderot, c’est peut-être moins la construction habile d’un sujet envisagé, d’une part pour lui-même dans sa complexité interne, d’autre part dans sa relation rhétorique à autrui (Croismare, en l’occurrence), éléments qui donnent une partie de leur originalité aux romans plus anciens de Marivaux et de Prévost, que la confrontation de ce sujet à ce destin, et la mise en scène de la violence tourmentée avec laquelle il se débat, pris au piège, comme dans un cauchemar, pour lui échapper. Particulièrement frappante de ce point de vue est une des particularités de notre narratrice qui a parfois attiré l’attention, notamment de Florence Lotterie à propos de l’âge de la narratrice : son caractère globalement statique, immobile. On peut bien sûr traquer des indices du contraire et chercher dans ce roman les éléments de la construction d’une personnalité, mais il est difficile de tout récupérer dans cette logique. Dans les premières lignes du roman, la narratrice excuse le style négligé de son récit par ce qu’elle appelle « la naïveté d’un enfant de mon âge », et comme Florence Lotterie le montre dans les notes de son édition, le moins qu’on puisse dire est que si l’on prend en compte les données ultérieures du roman, Suzanne est très éloignée, au moment où elle prend la plume pour raconter sa vie à Croismare, d’être une enfant25. La première hypothèse, c’est que Suzanne cabotine, et qu’elle se présente comme une enfant qu’elle n’est pas pour émouvoir et/ou émoustiller son destinataire : c’est mettre cette prétendue enfance sur le compte d’une stratégie de la narratrice et contribuer à lui donner le statut de « unreliable narrator » cherchant à ferrer sa proie. Mais cette hypothèse se heurte à une donnée énonciative majeure de ce passage : de manière assez énigmatique, dans ces premières lignes, Croismare n’est pas destinataire du texte, puisqu’on parle de lui à la troisième personne, phénomène qu’on retrouve à la fin du roman. Cela suggère que ces lignes ne lui sont pas adressées, et invite à se demander à qui d’autre elles pourraient bien l’être. Si c’est un « pense-bête » à usage personnel pour Suzanne elle-même, on voit mal pourquoi elle chercherait à se mentir à elle-même sur son âge. Une autre hypothèse, complètement opposée, c’est que Diderot a besoin pour la puissance pathétique de son récit que Suzanne soit et reste, y compris dans une complète invraisemblance, une enfant, et qu’il lui attribue des informations contradictoires à son propre sujet, sans se soucier de leur cohérence, pour sauvegarder l’essentiel : l’innocence de l’énonciatrice qui lui donne un maximum d’impact émotionnel et en fait l’objet idéal de la compassion des éventuels lecteurs et, en attendant, au moment de la création, de sa propre compassion. Remarquons à ce sujet que les éléments épars dans le roman qui peuvent donner l’impression d’une évolution de Suzanne, comme par exemple son attitude de meneuse contre la supérieure Sainte-Christine26, ne débouchent pas forcément sur grand-chose par la suite, et ne participent pas de manière très crédible à la construction d’un « sujet en mouvement » à la transformation duquel nous pourrions nous intéresser pour elle-même. Les caractérisations du personnage sont assez capricieuses, pour ne pas dire instables ‒ et l’on peut penser que l’essentiel est ailleurs, non dans la construction d’un caractère ou la mise en évidence de ses petites ruses, rhétoriques ou non, mais dans la confrontation d’un être humain à une manière de vivre qu’il s’obstine avec suite et détermination à refuser. Envisager Suzanne sous un angle existentiel plutôt que psychologique semble en tout cas une entrée possible dans le roman.

Dans la Préface-annexe, plusieurs passages suggèrent que la seule attitude envisagée par ses rédacteurs par rapport à la narratrice est compassionnelle : son modèle dans la réalité est présenté comme une « pauvre recluse »27 ; quelques lignes plus loin elle est évoquée comme une « infortunée »28 puis comme « notre pauvre religieuse »29. Beaucoup plus loin, on parle de Suzanne comme d’une « âme douce, sensible et tendre, capable de toucher les cœurs les moins enclins à la compassion »30. Croismare lui-même, au moins en tant que récepteur des lettres (y compris de la longue lettre qu’est le « roman » se voit attribuer un rôle « touchant »31. Et quand il est question, non de ces deux figures centrales de l’énonciation romanesque, mais de l’impact supposé du roman sur un lecteur, c’est constamment sa sensibilité et non sa distance critique qui est évoquée : « On n’en pouvait pas lire une page sans verser des pleurs ; et cependant il n’y a point d’amour »32. L’absence d’amour n’est pas ici présentée comme un élément servant à caractériser Suzanne sur le plan psychologique, mais comme ce qui permet un pathétique plus pur, comme dans certaines tragédies de Voltaire qui se targuent d’être « sans amour » justement, et de trouver dans un fond moins commun que le sentiment amoureux de quoi émouvoir le spectateur. Enfin, le romancier au travail est présenté, dans un ajout de Diderot à la préface initiale, comme une sorte de modèle de comportement pour le lecteur futur, et il a « le visage inondé de larmes » en écrivant ce qui serait devenu, dit la suite du texte « un des romans les plus vrais et les plus pathétiques que nous avons ». On peut évidemment déplacer le soupçon d’une narratrice « indigne de confiance » à un auteur « indigne de confiance » dans cette mise en scène de lui-même dans son activité créatrice, mais le seul gain, si c’en est un, c’est de tout passer au crible d’une méfiance structurelle33. Qu’on considère ou non la « préface » comme un des deux éléments d’une composition romanesque complexe, la question de la mystification ne concerne jamais l’étage inférieur de l’énonciation – son plan fictionnel ‒ et rien ne vient donc cautionner dans la « Préface » une approche critique de l’énonciatrice et son approche par le lecteur comme « indigne de confiance ».

Qu’il y ait dans La Religieuse une réflexion profonde sur les mécanismes de la création fictionnelle n’en est pas moins indéniable, mais le mystère avec lequel la préface-annexe, comme c’était déjà le cas dans l’Éloge de Richardson, se débat, est la capacité pour un sujet d’énonciation qu’il sait pertinemment faux de toucher au moins autant le lecteur qu’un sujet d’énonciation réel. En outre, le ressort principal de la création de cette œuvre, il ne faut pas l’oublier, n’est pas la méditation métafictionnelle d’un brillant esprit préfigurant les théories de la fiction de notre époque, mais l’indignation, l’épouvante d’un homme confronté à la réalité des vies brisées qui sont le paysage obsédant de son propre temps historique. Déjà, dans les Pensées philosophiques (1745), Diderot dressait un sombre tableau des existences dévastées par une conception religieuse du monde :

Quelles voix ! quels cris ! quels gémissements ! Qui a renfermé dans ces cachots tous ces cadavres plaintifs ? Quels crimes ont commis tous ces malheureux ? Les uns se frappent la poitrine avec des cailloux ; d’autres se déchirent le corps avec des ongles de fer ; tous ont les regrets, la douleur et la mort dans les yeux. Qui les condamne à ces tourments ? ‒ Le Dieu qu’ils ont offensé. ‒ Quel est donc ce Dieu ? ‒ Un Dieu plein de bonté. ‒ Un Dieu plein de bonté trouverait-il du plaisir à se baigner dans les larmes ! Les frayeurs ne feraient-elles pas injure à sa clémence ? Si des criminels avaient à calmer les fureurs d’un tyran, que feraient-ils de plus ?34

En 1766, Diderot est ébranlé, comme tous les philosophes, par l’effroyable conclusion de l’affaire du chevalier de La Barre, victime d’une conception religieuse du monde, éternellement « jeune » comme notre narratrice, puisque sa vie a été fauchée par la justice de son époque à l’âge de vingt et un ans. S’il refuse de suivre le conseil de Voltaire qui lui recommande de fuir la France pour aller participer à l’étranger à une communauté de philosophes affranchis de l’oppression politique française, Diderot n’en exprime pas moins un dégoût absolu pour ce qui s’est passé, évoque dans une des plus belles lettres de toute sa vie le fait qu’ « ils35 viennent d’égorger un enfant pour des inepties qui ne méritaient qu’une légère correction paternelle » et s’épouvante que lorsqu’une « bête féroce a trempé sa langue dans le sang humain, elle ne peut plus s’en passer »36. Les dernières lignes de la lettre reviennent sur cette « bête » qui est une variation sur l’« infâme » de son illustre destinataire, et il va de soi que pour Diderot la narratrice de notre roman, avant d’être (éventuellement) une experte en habileté rhétorique mesurant avec soin ses effets sur son destinataire, est une de ses victimes.

Rapprochons-nous de l’époque de composition du roman : le 29 décembre 1760, l’année-même de toute cette affaire, Diderot écrit une autre lettre portée de bout en bout par l’écœurement dont le destinataire est cette fois-ci non un allié, mais un ennemi en la personne de son propre frère Didier-Pierre : celui-ci vient de se voir confier la mission de propagandiste de la foi catholique romaine dans le diocèse de Langres, et Diderot lui reproche avec violence et douleur d’être un fanatique et un ennemi de la liberté de conscience : pour ce faire, il produit comme dans La Religieuse un discours qui n’est pas en rupture ouverte avec le christianisme, comme pour mieux dénoncer de l’intérieur de ce dernier ses égarements les plus funestes. Le sujet, qui n’est pas celui des vœux forcés mais qui n’en est tout de même pas bien éloigné, est la violation des consciences obligées, pour les jansénistes, de se soumettre à une bulle Unigenitus qu’ils exècrent, pour les protestants de produire des simulacres de conversion contre leurs convictions les plus intimes, et, on peut le supposer, pour les « esprits forts » qui se sont aventurés, comme le futur chevalier de La Barre, ou comme le propre frère de l’intéressé, du côté du déisme ou de l’athéisme, de renier leurs convictions profondes pour sauver leurs vies. Diderot ne cesse de citer Jésus pour montrer les contradictions entre son message et les pratiques odieuses de son frère, et d’en appeler à un Dieu auquel nous savons parfaitement qu’il ne croit pas37. Il se fabrique donc un « ethos » de croyant pour donner plus de force à son discours, d’une manière qui n’est pas complètement étrangère à ce qu’il fait en créant l’énonciation fictionnelle de Suzanne Simonin. Un tel constat peut permettre, non d’annuler, mais de réduire l’écart que nous avons observé au début de cet article entre les croyances de l’auteur et celle de sa créature de papier, si l’on admet qu’il fabrique dans certains cas une image de lui-même qui en est assez proche, non hypocritement ou ironiquement, il faut insister sur ce point, mais sous le coup d’une violente émotion qui ébranle son être et l’amène à affronter sur une dramatique scène énonciative son alter-ego le plus intime.

Il n’est pas excessif dans ces conditions d’imaginer un Diderot écrivant le récit de La Religieuse en s’identifiant de manière extrêmement forte à son personnage au point, parfois, de rendre confuse la ligne de démarcation entre la voix de son personnage et la sienne propre, et de devenir, encore une fois comme en un rêve, lui, la victime de tout ce qui est raconté. Cet extrême investissement émotionnel dans l’acte créateur pourrait en partie expliquer les célèbres incohérences énonciatives et informationnelles qui émaillent le roman, car, précisément comme dans un rêve encore, les contradictions n’entament en rien le sentiment de réalité de ce qu’il vit qu’éprouve le rêveur, l’essentiel étant la confrontation violente d’un sujet, lui-même potentiellement instable dans son identité mais puissamment unifié par l’émotion, à une expérience – en l’occurrence presque entièrement négative, cauchemardesque. Une telle expérience de fusion entre énonciation réelle et énonciation fictive, si l’on en admet l’hypothèse, appelle de toute évidence après coup un recul réflexif. Ce n’est peut-être pas suffisant pour donner à un tel moment de prise de distance la place principale dans l’interprétation de l’œuvre. Et qu’on le fasse ou non, la manière dont on appréhende la voix fictive qui en est le centre poétique n’est pas forcément affectée.

1 Sur ce point, l’étude de référence est celle d’Antonia Zagamé, L’Écrivain à la dérobée, L’auteur dans le roman à la première personne (1721-1782)

2 On trouvera constamment dans cet article le mot « Mémoires » en ce sens écrit avec une majuscule : pour une argumentation en faveur de cet usage

3 Consulté en ligne le 17/10/2022 sur cette page : https://books.google.fr/books?id=6yQ-AAAAcAAJ&printsec=frontcover#v=onepage&q&f=false

4 Consulté en ligne le 17/10/2022 sur cette page : http://enccre.academie-sciences.fr/encyclopedie/article/v10-923-2/?query=m%C3%A9moires

5 Je souligne.

6 Diderot : L’écriture romanesque à l’épreuve du sensible, Paris, Honoré Champion, 1997.

7 Christophe Martin commente La Religieuse de Diderot, Paris, Gallimard, 2010, p. 123. Il pose ici une question cruciale : « que devient la portée

8 Ibid., Par exemple p. 135 : « une monstruosité plus insidieuse se révèle alors : celle qui affecte Suzanne elle-même et qui se manifeste dans son

9 Ibid., p. 120.

10 Ibid., p. 141.

11 Wayne Booth, The Rhetoric of Fiction, Chicago, University of Chicago Press, 1977 [1961] p. 105.

12 Dorrit Cohn, Le Propre de la fiction, Paris, Le Seuil, traduit de l’anglais par Claude Hary-Schaeffer, 2001 [1999], p. 95-123, chapitre « L’

13 Diderot et « La Religieuse », Yale Université Press New Haven, PUF, 1954, p. 161-196, chapitre « Signification de La Religieuse ».

14 Denis Diderot, La Religieuse, éd. Robert Mauzi, Paris, Gallimard, « Folio », 1972, p. 36-37.

15 Christophe Martin commente La Religieuse, Paris, Gallimard, « Foliothèque », 2010, p. 49-52, chapitre justement intitulé « Un roman chrétien ? ».

16 « Pensées philosophiques », Œuvres de Diderot I, éd. Laurent Versini, Paris, Robert Laffont, p. 32-33 pour un développement particulièrement

17 Je souligne.

18 La Religieuse, éd. Florence Lotterie, Paris, GF Flammarion, 2009, p. 90.

19 Il faut cependant rappeler que la tendance compassionnelle des Lumières s’est souvent exercée sur des groupes de croyances auxquels elles étaient

20 Dans sa thèse soutenue en 2004 à l’Université Paris-Diderot sous le titre Une Rhétorique iconoclaste. Ordre et désordre dans le Tableau des

21 Nicholas Paige, « Diderot démystifié. Les lectures de La Religieuse », RHLF n° 4 2011, p. 851-858.

22 Je souligne.

23 Ibid., p. 851.

24 Nicholas Paige, « Diderot démystifié. Les Lectures de La Religieuse », RHLF n° 4 2011, p. 851-868.

25 Éd. Florence Lotterie, p. 12.

26 P. 50-54 de l’édition de Florence Lotterie.

27 P. 197.

28 P. 198.

29 P. 199.

30 P. 222.

31 P. 222.

32 P. 198.

33 « L’on est plus souvent dupe par la défiance que par la confiance » écrivait dans ses Mémoires, bien connus de Diderot qui se souvient de leur

34 Œuvres tome I, éd. Laurent Versini, Paris, Robert Laffont, « Bouquins », 1994, p. 20.

35 Je souligne.

36 Œuvres tome V, éd. Laurent Versini, Paris, Robert Laffont, « Bouquins », 1997, p. 701 pour ces deux citations.

37 Œuvres tome V, éd. Laurent Versini, Paris, Robert Laffont, « Bouquins », 1997, p. 335-339 pour l’ensemble de cette lettre essentielle.

1 Sur ce point, l’étude de référence est celle d’Antonia Zagamé, L’Écrivain à la dérobée, L’auteur dans le roman à la première personne (1721-1782), Louvain-la-Neuve, Peeters, 2011.

2 On trouvera constamment dans cet article le mot « Mémoires » en ce sens écrit avec une majuscule : pour une argumentation en faveur de cet usage, voir l’introduction coécrite par Jean-Louis Jeannelle, Damien Zanone et moi-même au dossier « Le sens du passé », La Licorne n° 104, 2013, p. 3-9.

3 Consulté en ligne le 17/10/2022 sur cette page : https://books.google.fr/books?id=6yQ-AAAAcAAJ&printsec=frontcover#v=onepage&q&f=false

4 Consulté en ligne le 17/10/2022 sur cette page : http://enccre.academie-sciences.fr/encyclopedie/article/v10-923-2/?query=m%C3%A9moires

5 Je souligne.

6 Diderot : L’écriture romanesque à l’épreuve du sensible, Paris, Honoré Champion, 1997.

7 Christophe Martin commente La Religieuse de Diderot, Paris, Gallimard, 2010, p. 123. Il pose ici une question cruciale : « que devient la portée satirique et philosophique de l’œuvre si l’héroïne n’est pas l’innocente victime de l’abominable institution des cloîtres, mais une séductrice perverse dotée de pouvoirs funestes ? ».

8 Ibid., Par exemple p. 135 : « une monstruosité plus insidieuse se révèle alors : celle qui affecte Suzanne elle-même et qui se manifeste dans son inaptitude à se situer en sujet de désir ».

9 Ibid., p. 120.

10 Ibid., p. 141.

11 Wayne Booth, The Rhetoric of Fiction, Chicago, University of Chicago Press, 1977 [1961] p. 105.

12 Dorrit Cohn, Le Propre de la fiction, Paris, Le Seuil, traduit de l’anglais par Claude Hary-Schaeffer, 2001 [1999], p. 95-123, chapitre « L’ambiguïté générique de Proust » avec un développement sur la question du narrateur et de sa fiabilité plus spécifiquement p. 115 et suivantes.

13 Diderot et « La Religieuse », Yale Université Press New Haven, PUF, 1954, p. 161-196, chapitre « Signification de La Religieuse ».

14 Denis Diderot, La Religieuse, éd. Robert Mauzi, Paris, Gallimard, « Folio », 1972, p. 36-37.

15 Christophe Martin commente La Religieuse, Paris, Gallimard, « Foliothèque », 2010, p. 49-52, chapitre justement intitulé « Un roman chrétien ? ». Les objections à la lecture de May sont concentrées p. 51-52.

16 « Pensées philosophiques », Œuvres de Diderot I, éd. Laurent Versini, Paris, Robert Laffont, p. 32-33 pour un développement particulièrement significatif sur ce sujet – et la citation.

17 Je souligne.

18 La Religieuse, éd. Florence Lotterie, Paris, GF Flammarion, 2009, p. 90.

19 Il faut cependant rappeler que la tendance compassionnelle des Lumières s’est souvent exercée sur des groupes de croyances auxquels elles étaient hostiles : Voltaire déteste la pensée janséniste, mais il défend les jansénistes contre leurs persécuteurs et crée dans L’Ingénu le personnage de Gordon qui concentre poétiquement cette ambiguïté. Diderot aussi bien que Voltaire sont totalement étrangers aux conceptions protestantes, même si le premier entretient l’illusion de pouvoir tirer l’élite intellectuelle protestante de Genève vers le déisme, mais tous deux sont bouleversés par l’affaire Calas qui leur donne l’occasion de transformer la compassion en action. Dans Le Neveu de Rameau, « Moi » produit d’ailleurs ce formidable hommage à Voltaire : « C’est un sublime ouvrage que Mahomet ; j’aimerais mieux avoir réhabilité la mémoire des Calas » (Œuvres, éd. L. Versini, Paris, Robert Laffont, « Bouquins », 1994, p. 651-652.

20 Dans sa thèse soutenue en 2004 à l’Université Paris-Diderot sous le titre Une Rhétorique iconoclaste. Ordre et désordre dans le Tableau des différens de la religion de Philippe de Marnix de Sainte-Aldegonde.

21 Nicholas Paige, « Diderot démystifié. Les lectures de La Religieuse », RHLF n° 4 2011, p. 851-858.

22 Je souligne.

23 Ibid., p. 851.

24 Nicholas Paige, « Diderot démystifié. Les Lectures de La Religieuse », RHLF n° 4 2011, p. 851-868.

25 Éd. Florence Lotterie, p. 12.

26 P. 50-54 de l’édition de Florence Lotterie.

27 P. 197.

28 P. 198.

29 P. 199.

30 P. 222.

31 P. 222.

32 P. 198.

33 « L’on est plus souvent dupe par la défiance que par la confiance » écrivait dans ses Mémoires, bien connus de Diderot qui se souvient de leur préambule dans la première page de son roman, le cardinal de Retz : Mémoires, éd. Simone Bertière, Paris, La Pochothèque, 1998 [1987], p. 297.

34 Œuvres tome I, éd. Laurent Versini, Paris, Robert Laffont, « Bouquins », 1994, p. 20.

35 Je souligne.

36 Œuvres tome V, éd. Laurent Versini, Paris, Robert Laffont, « Bouquins », 1997, p. 701 pour ces deux citations.

37 Œuvres tome V, éd. Laurent Versini, Paris, Robert Laffont, « Bouquins », 1997, p. 335-339 pour l’ensemble de cette lettre essentielle.

Marc Hersant

Marc Hersant est professeur de littérature du XVIIIe siècle à l'Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle – Université des Cultures et directeur de l’EA 174 « Formes et idées de la Renaissance aux Lumières ». Ses travaux portent sur les mémorialistes, l'écriture de l'histoire, les rapports entre histoire et fiction, les liens entre littérature et philosophie, littérature et religion, la théorie du récit non fictionnel. Il a notamment publié Le Discours de vérité dans les « Mémoires » du duc de Saint-Simon (Honoré Champion, 2009), Voltaire : Écriture et vérité (Peeters, 2015), Saint-Simon (Gallimard, 2016, grand prix de l'Académie Française de la meilleure biographie littéraire), Genèse de l’impur, L’écriture carcérale du marquis de Sade, Armand Colin, 2021. Il a également publié de nombreux articles et dirigé une vingtaine d’ouvrages collectifs : il est en particulier responsable depuis 2009 avec Catherine Ramond (Université Bordeaux Montaigne) du programme « Récit et vérité à l’époque classique » (quatre volumes parus, un cinquième volume à paraître). Il porte actuellement un projet de Dictionnaire des mémorialistes d’Ancien Régime, de Commynes à Chateaubriand, à paraître en 2025 aux Classiques Garnier.