Les musiques de films « médiévaux » : de l’abstraction à la recomposition

Anne Ibos-Augé

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Anne Ibos-Augé, « Les musiques de films « médiévaux » : de l’abstraction à la recomposition », Tropics [En ligne], 9 | 2020, mis en ligne le 01 décembre 2020, consulté le 08 novembre 2024. URL : https://tropics.univ-reunion.fr/1764

Adaptations d’œuvres littéraires, histoires issues de traditions ou de mythes, reconstitutions tirant vers le « biopic », très nombreux sont les films plongeant le spectateur dans l’univers médiéval. Dans « un » univers médiéval, devrait-on plutôt dire, tant est difficile la question de l’unicité en la matière. Les spécialistes dénom­brent entre trois cents et près de six cents entrées selon les critères de choix retenus1. Deux univers s’y rencontrent : celui de la chevalerie et de la courtoisie et celui du légendaire et du merveilleux. Cette question d’un « univers médiéval » se complexi­fie encore davantage dès lors que l’on se penche sur l’arrière-plan musical choisi par les cinéastes pour illustrer leur propos. Entre silence et foisonnements musicaux parfois extrêmement disparates, reconstitutions aspirant à l’« historiquement infor­mé » et musiques déjà passées au filtre d’un médiévalisme romantique, hésitant souvent entre un hypothétique « à la manière de » et un vague « folklorisant », tom­bant parfois dans l’amalgame, le simplisme, voire l’anachronisme, les choix sont multiples. François Amy de la Bretèque, chercheur spécialiste du thème, distingue trois voies possibles en termes de reconstitution ou d’évocation : « l’abstraction concrète », la « recomposition iconographique archéologique » et « l’évocation indirecte »2. Ces trois voies pourraient de la même manière s’appliquer à la musique illustrant les films médiévaux. En effet, des premiers films historiques des années 30 – l’étude ne s’attachera pas aux films muets sonorisés qui à eux seuls constituent un corpus – aux reconstitutions du début du XXIe siècle, il semble que trois partis pris généraux se dégagent chez les metteurs en musique : celui d’une bande-son résolument en marge de toute évocation – fût-elle imaginaire – d’un univers sonore « réellement » (ou « réalistement ») médiéval, qui correspondrait à « l’abstraction concrète », celui de la composition de musiques originales inspirées de thèmes médiévaux connus – la recomposition iconographique archéologique – et, enfin, celui du choix de musiques additionnelles préexistantes que la culture populaire assimile, à tort ou à raison, au Moyen Âge – pour l’évocation indirecte. En outre, quelques films proposent plusieurs des partis pris et paraissent ainsi vouloir faire appel, chez le spectateur, à un imaginaire multiple.

Les films à sujet médiéval : quel corpus ?

Du début de la période médiévale dite « historique » – généralement cir­conscrite entre l’effondrement de l’Empire romain et une date plus fluctuante, le plus souvent dans les années 1470 –, il ne reste aucune musique notée3. On considère Machaut (ca 1300-1377) comme le dernier des grands compositeurs médiévaux, la période suivant sa mort étant généralement considérée comme une transition vers les polyphonies franco-flamandes de la première Renaissance. L’histoire et la mu­sique ne se recoupent donc pas et on est déjà quasiment dans ce qu’on appelle la Renaissance en musique alors qu’historiquement on n’y est pas encore. Établir un corpus de « films médiévaux » questionne donc le chercheur triplement : quand commence-t-on ? Quand finit-on ? Qu’y place-t-on ? Si l’on commence au Ve siècle, aucune musique contemporaine de la période ne peut être utilisée. Si on finit avec, par exemple, les films – nombreux – sur Jeanne d’Arc, on y trouve des musiques… de la Renaissance, alors même que, morte en 1431, la pucelle appartient encore à la période dite « historique ». Si l’on pense, autre exemple, à la matière arthurienne, il ne faut pas perdre de vue que la plupart des films sont déjà passés au filtre des « romans de la table ronde » du XIIIe siècle. Se superposent ainsi, dans l’inconscient collectif, le début du VIe siècle, époque où Arthur est supposé avoir vécu, et la période des débuts des mises en scènes du thème, la seule finalement pour laquelle la musique a survécu.

Dans le cadre de ces pages, j’ai voulu me limiter à un corpus de sujets posté­rieurs aux premières traces de musique écrite – donc après le IXe siècle4. Je me suis également attachée à des films un peu connus – au moins en leur temps –, voire à des succès critiques et/ou populaires5 en examinant les trois partis pris récurrents évoqués plus haut, dont certains cohabitent parfois au sein d’une même œuvre.

En marge de tout réalisme : distanciation de l’abstraction

Parlant d’abstraction ou d’irréalisme, un des premiers exemples qui viennent à l’esprit est probablement Tristan et Iseult d’Yvan Lagrange dont la partition, due au compositeur-batteur-chanteur Christian Vander, transpose l’histoire des deux amants directement au XXe siècle et suscite de la part du spectateur une nécessaire réappropriation du mythe. D’autres exemples moins extrêmes peut-être témoignent d’une certaine distanciation entre le temps de l’histoire et celui du film. The Adventures of Robin Hood de Michael Curtiz et William Keighley emprunte par exemple sa « voie » musicale au compositeur autrichien Erich Korngold qui adapte deux œuvres préexistantes, sa Sinfonische Ouvertüre (« Sursum Corda ! ») für grosses Orchester op. 13 et « Miß Austria », valse utilisée pour l’achèvement de l’opérette de Leo Fall Rosen aus Florida et réutilisée dans les scènes de banquet à Sherwood ainsi que dans la marche qui commence et termine le film. La musique obéit aux clichés usuels de la production hollywoodienne des années quarante : musique bruyante et rythmée lors des moments d’action, cordes tenues dans l’aigu6 lors des scènes sentimentales. L’impression d’ensemble, entre fanfares de trompettes et valse, auxquelles s’ajoutent des motifs puisés à quelques airs du XVIe siècle est celle d’un anachronisme absolu. Les seules concessions à l’époque médiévale sont à porter au nombre des clichés stylistiques mais participent toujours de cet ana­chronisme : la mélodie de Sumer Is Icumen In sifflée par Petit-Jean n’appartient pas, de quelque manière que l’on se place, à la « bonne » époque7 et les instruments représentés lors de la scène du banquet au château de Sherwood, s’ils sont presque « possibles » – harpe, chalemie double, luth8 et vièle – ne sont nullement crédibles : la harpe est dépourvue de cordes et les musiciens feignent de jouer. À l’instar de leitmotives, les thèmes musicaux font l’objet d’une utilisation narrative : à une situa­tion, un personnage ou un type d’action correspondent des motifs précis dont les éventuelles transformations éclairent le spectateur sur l’évolution du scénario, en même temps qu’elles en proposent une dramatisation assez convenue. Autre parfait exemple de ce processus, Knights of the Round Table de Richard Thorpe fait la part belle à la musique – quasi omniprésente – et mêle selon les occasions tonalité et chromatismes. L’épisode au cours duquel Arthur sort Excalibur de sa gangue de pierre fait ainsi entendre un motif au rythme pointé caractéristique issu du thème de la marche des chevaliers entendu dès les premières minutes du générique initial et qui se poursuit durant la première scène du film (ex. 1).

Ex. 1 : Motif de la marche des chevaliers

Ex. 1 : Motif de la marche des chevaliers

Ce « motif de l’épée » est entendu à l’orchestre, harmonisé en fa mineur, aux cordes graves seules puis aux cordes et aux cuivres (ex. 2) au moment où Merlin enjoint Mordred et Arthur de prouver leur légitimité en s’emparant d’Excalibur. De brefs motifs mélodiques déployant des intervalles diminués et augmentés, toujours dans la tonalité sombre de fa mineur (ex. 3) se font entendre lors de l’essai infruc­tueux de Mordred, dans lesquels se perçoivent les influences de Wagner – pour le contour mélodique du thème – et de Stravinski – pour la rythmique saccadée. Lorsqu’Arthur sort – lentement, suspens oblige – l’épée du rocher, la tête du motif, transposée sur fa, est majorisée. Le motif sera repris, dans sa tonalité originelle, quand Lancelot jette l’épée à la mer.

Ex. 2 : Première présentation du motif de l’épée

Ex. 2 : Première présentation du motif de l’épée

Ex. 3 : Première transformation du motif (tentatives infructueuses de Mordred)

Ex. 3 : Première transformation du motif (tentatives infructueuses de Mordred)

Ce même jeu sur un thème et ses transformations est à l’œuvre dans plusieurs autres films. Ainsi La Source, film très silencieux comme souvent chez Bergman, est-il traversé seulement par deux motifs musicaux. Les deux visages du premier – simple et tonal/torturé et chromatique – s’attachent aux deux phases temporelles du film : avant la violence/après la violence. Le second est lié au miracle final : le jaillissement de la source à l’endroit où l’on a trouvé le cadavre de la jeune fille violée puis tuée alors qu’elle allait porter des cierges à l’église est accompagné par une ligne d’une grande simplicité, chantée par un chœur à la manière d’un cantique mais nullement médiévale. Dans Le Septième Sceau, du même réalisateur, la Mort possède aussi un motif caractéristique joué à la clarinette basse souvent ponctuée d’accords de cuivres – on retrouve ici la même connotation dramatique allouée aux cuivres qui caractérisait Knights of the Round Table –, qui subit au long du film plusieurs modifications successives.

Rien n’est médiéval non plus dans la mélodie du joueur de flûte dans le film éponyme (en anglais The Pied Piper) de Jacques Demy, dont la musique, composée par le chanteur pop Donovan provoque le même décalage temporel que celle de Christian Vander pour Tristan et Iseult9 ; le thème est présenté une première fois lors de l’apparition du joueur de flûte incarné par Donovan. Il est ensuite entendu à plusieurs reprises, notamment naturellement quand le flûtiste amène les rats, puis les enfants hors de la ville. Sa présentation à découvert est plus ou moins modale mais il sera par la suite orchestré tonalement. Cette modalité initiale est probablement
à mettre en parallèle avec l’extrême simplicité de la mélodie, comme si cette combinaison – modalité approximative et simplisme mélodique – était garante de « médiévalisme ». Lorsque le chant de la flûte guérit la jeune fille du bourgmestre, le motif est transformé pour devenir clairement tonal ( majeur), même s’il demeure monodique. La flûte à bec est « dans le thème » mais la guitare et son extravagante décoration fleurie ne l’est nullement et compte parmi les éléments du film qui accusent un vieillissement certain.

Par un glissement peut-être justifié par certaines études musicologiques déjà anciennes10 s’opère parfois une association entre modalités ancienne et orientale : la musique de Michel Portal pour Le Moine et la Sorcière offre ainsi une monodie à l’allure improvisée dont le début plus ou moins modal fait place à une échelle à seconde augmentée descendante caractéristique des musiques arabo-andalouses.

La tentation archéologique

Peu de films, dans le corpus étudié, recourent réellement à un matériau musical authentique. Il s’agit soit de séquences exceptionnelles et symboliques, soit, bien plus rarement, d’un parti pris esthétique délibéré.

Le Septième sceau d’Ingmar Bergman prend son origine dans sa pièce Peinture sur bois11 et figure une partie d’échecs avec la mort. Et c’est d’ailleurs le motif du Dies iræ qui y est utilisé, de diverses façons, comme référence à la fois à la mort et à sa surnaturelle personnification. Il est joué par les timbales et les cuivres au mo­ment où l’écuyer veut demander son chemin à un homme qui se révèle être un cadavre, victime de la peste, puis au moment de la procession des flagellants suppo­sée enrayer les forces démoniaques. Cette fois, la mélodie est chantée par le chœur des moines en marche, cas – rare dans le film – de musique diégétique. Le motif intervient aussi lors de l’arrivée du convoi amenant la sorcière sur le lieu de son supplice et de brefs rappels surviennent parfois comme rappel du jeu auquel se livre le chevalier avec la Mort. La mélodie originelle provient d’une messe des morts composée par Thomas de Celano autour de 1250 (ex. 4).

Ex. 4 : La mélodie du Dies iræ

Ex. 4 : La mélodie du Dies iræ

Ici dans le mode originel, la séquence est transposée à la tierce majeure supé­rieure dans le film et rythmée dans un probable souci de modernisation : la musi­cologie des années cinquante était encore partisane de transcriptions rythmées, souvent même arrangées. La danse macabre finale, vue par le seul forain Jof, est accompagnée du même Dies iræ, cette fois-ci en la. Le motif est parfois joué à la clarinette basse, en une manière de résumé musical alliant le timbre spécifique dévolu à la Mort (personnage) évoqué plus haut et la musique de circonstance asso­ciée à la mort (état). Paradoxalement, la première apparition du personnage est accompagnée du silence le plus parfait : aucune musique, pas même le bruit des vagues jusque-là sur la bande-son, qui s’est tu. De même, dans la séquence initiale, le vol de l’oiseau de proie – figurant l’aigle de l’Apocalypse évoqué par la voix-off, qui cite un fragment du Livre des Révélations – est-il complètement silencieux. Ce silence, parfaite illustration du silence qui suivit l’ouverture du septième sceau dans le passage cité par la voix-off, confère au reste à la scène une force tout à fait surprenante.

Les choix de la cinéaste allemande Margarethe von Trotta s’accordent aussi parfaitement avec son sujet : film retraçant la vie de la mystique Hildegarde von Bingen, Vision donne à entendre deux répons d’Hildegarde, O quam preciosa est virginitas et O vis eternitatis, et un fragment de son Ordo virtutum. Un Kyrie et quelques exemples de psalmodie complètent l’ensemble dont la crédibilité est accen­tuée par le fait que ce sont les acteurs du film qui jouent et chantent les musiques, relevant d’ailleurs presque toutes de la diégèse12. Quelques années auparavant dans Le Nom de la Rose, James Horner et Jean-Jacques Annaud faisaient de même chanter les acteurs-moines dans l’abbaye marquée par les meurtres scénographiés à l’imi­tation de l’Apocalypse.

Si le rapport entre le sujet du film et la musique choisie pour l’illustrer est évident chez Bergman et von Trotta – et, à une moindre échelle, chez Annaud –, d’autres partis pris d’authenticité le sont parfois moins. Avec Ivanhoe, Richard Thorpe tente par exemple une approche « historique » assez inattendue. Mêlant les éléments du roman de Walter Scott et le Récit d’un ménestrel de Reims, le film assimile le chevalier Wilfrid d’Ivanhoé au trouvère Blondel de Nesle supposé, selon une légende pseudo-historique, avoir sauvé Richard Cœur de Lion alors captif en Autriche grâce à une chanson qu’il l’aurait entendu chanter13. Pour autant Miklós Rózsa, compositeur attitré de Thorpe et longtemps attaché à la MGM, ne recourt, pour cette chanson entendue au début du film, à aucun modèle authentique. Ceux-ci sont réservés à des moments ultérieurs de l’œuvre qui utilise à plusieurs reprises comme motifs récurrents deux compositions attribuées respectivement à Richard et au troubadour Guiraut de Bornelh14. De même le choix du « Kyrie » de la Messe de Tournai pour illustrer musicalement la nouvelle de saint Ciappelletto dans Il Decameron de Pier Paolo Pasolini, peut surprendre, même s’il tient probablement au sujet du conte15 : sur son lit de mort, Ciappelletto, séducteur impénitent, leurre le prêtre et se fait canoniser. La polyphonie est donnée la première fois au milieu d’une sorte de carnaval curieux tenant de la fête champêtre et de la procession farfelue, puis reprise au moment du discours du confesseur demandant à la foule d’honorer le nouveau saint.

Parmi les – rares – films dont le parti pris « archéologique » tient de la reven­dication esthétique, deux œuvres s’imposent, tout en proposant des partis pris fort différents : Perceval le Gallois16 et Blanche. Éric Rohmer, dans le premier, joue sur deux tableaux. Le film, qui donne à entendre de larges extraits du Perceval de Chrétien de Troie, fait appel à des musiciens jouant réellement sur le tournage des mélodies dans lesquelles on reconnaît des formules issues de la lyrique profane17 et sur lesquelles les acteurs psalmodient le texte ou qui fournissent le point de départ d’improvisations telles que l’on peut parfaitement imaginer qu’elles aient été couramment pratiquées, même si la tradition manuscrite ne les a pas conservées. Un exemple parmi d’autres intervient lors de l’apparition du chevalier portant la lance sanglante puis de la jeune fille portant le graal, alors que Perceval séjourne chez le roi pécheur : on entend alors une mélodie à l’orgue en mode de transposé sur mi bémol et construite à partir de formules issues du répertoire du plain-chant. La pratique du bourdon (la mélodie évolue sur une longue note tenue, un mi bémol) finit de camper la musique dans la période (ex. 5).

Ex. 5 : La mélodie liée à la présentation de la lance sanglante dans Perceval le Gallois

Ex. 5 : La mélodie liée à la présentation de la lance sanglante dans Perceval le Gallois

Dans Blanche, qui précède Perceval de quelques années et avec lequel il présente certains points communs18, le choix du réalisateur Valentin Borowczyck s’est porté sur le Groupe des Instruments Anciens de Paris. Les musiciens inter­viennent notamment sur scène au début du film lors de l’arrivée du roi au château de Blanche et de son époux. La musique annonce, dès le générique initial, des « originaux du XIIIe siècle », parmi lesquels on reconnaît en effet Sic mea fata canendo solor, chanson issue du vaste répertoire des Carmina Burana, le conduit Orientis partibus et, à l’extrême fin, une traduction en français moderne de la chan­son à danser A l’entrada del temps clar. Les – rares – extraits musicaux de ce film proposent ainsi une illustration mélodique pour le moins fidèle de son contenu narratif entre amour malheureux, satire du clergé et évocation des jaloux.

L’assimilation « folkloriste » populaire : le jeu de la recomposition

Entre quête d’authenticité et médiévalisme de convention il n’y a qu’un pas, parfois très vite franchi par les compositeurs de musiques de film. Mais ce médiévalisme « folklorique » emprunte plusieurs directions, telles le recours à un instrumentarium supposé réaliste, l’usage de la modalité ou le remploi de musiques assimilées au Moyen Âge par la postérité. Parmi les instruments aisément asso­ciables au Moyen Âge figurent cuivres, cornemuses et cloches. Les deux premiers sont le plus souvent entendus lors de scènes festives extérieures – jeux, tournois – et les derniers associés aux solennités politiques et/ou religieuses. Peu de films échappent à ces deux clichés, d’Ivanhoe à Braveheart19 en passant, Lancelot du lac, Il racconti di Canterbury20, Le Nom de la Rose, Le Moine et la Sorcière ou First Knight. Ce dernier opus mérite d’ailleurs une mention spéciale pour les apparitions régulières de cloches qui le ponctuent21, et qui introduisent un cliché plus ou moins médiévalisant dans une partition qui n’a rien d’historiquement authentique. Aux cloches s’ajoutent des clochettes dans Le Nom de la Rose, film par ailleurs remar­quable par une partition musicale combinant l’irréalisme historique d’une musique contemporaine et la recherche de timbres délibérément anciens22 visant à la « teinter » stylistiquement.

Si la guitare acoustique décorée de fleurs du Pied Piper est un exemple particulièrement extrême de « fantaisie instrumentale », le recours fréquent au luth, instrument qui ne détrônera les vièles et les harpes qu’à la Renaissance mais qui est presqu’un incontournable de la filmographie « médiévale » semble moins gêner les réalisateurs… et pas du tout le public non averti23. Non plus que les instruments ostensiblement inutiles parce que non joués ou, mieux encore, inutilisables, comme la harpe sans cordes aperçue dans The Adventures of Robin Hood. Parfois les instru­ments sont tout à fait crédibles mais combinés avec des éléments ana­chroniques, tels un recours à une modalité bien postérieure au Moyen Âge : ainsi le thème principal du Pied Piper est-il, certes, joué à la flûte, mais en mode de la, échelle qui n’existe pas encore au XIVe siècle, temps où est supposé se passer le film24. De la même façon, les motifs musicaux du film de John Huston A Walk with Love and Death sont-ils joués par des instruments « possibles » (flûte, harpe) mais leur mode de , et leurs cadences « fauréennes » sont plus proches de la première moitié du XXe siècle que du milieu du XIVe25. On pourrait en dire autant des motifs de bombarde de Lancelot du Lac et de leur ambiguïté entre modalité et tonalité. Ou du motif de harpe figurant l’amour coupable de Lancelot et Guenièvre dans Lancelot and Guinevere, modulant à souhait. Parfois, c’est la seule modalité qui est chargée de la nécessaire connotation ancienne et l’on ne compte pas les musiques seulement modales qui sont supposées crédibiliser les bandes son. Même le très documenté Vision déjà évoqué plus haut n’échappe pas à la règle, qui propose dès ses premières minutes une mélodie non mesurée en mode de , jouée par des instruments qui n’ont rien de médiéval. Chris Heyne a toutefois choisi pour ce qui apparaît comme un véritable leitmotive de l’œuvre, sujet à diverses transformations successives, plusieurs des formules mélodiques génératrices du répons O quam preciosa entendu deux fois dans le film (ex. 6).

Ex. 6 : Le début du répons O preciosa et deux présentations différentes du motif principal de Vision

Ex. 6 : Le début du répons O preciosa et deux présentations différentes du motif principal de Vision

Juste après les instruments et la modalité, à tort ou à raison assimilés au Moyen Âge, viennent les chœurs. Ils sont généralement utilisés avec parcimonie et réservés à certains moments spécifiques. Les scènes religieuses ou solennelles (offices litur­giques, mariages, couronnements, enterrements) s’accompagnent de monodies assi­milables – parfois à raison – au plain-chant. C’est le cas par exemple dans Knights of the Round Table où l’arrivée d’Arthur à Camelot est ponctuée par un « Deo gratias » accompagné par un orgue, dans Lancelot du Lac où un Requiem est enten­du dans la chapelle où se rend Lancelot à son arrivée au camp d’Arthur. Le plain-chant possède un rôle plus important dans Lancelot and Guinevere et le même fragment, chanté par des voix masculines, s’y fait entendre lors de la cérémonie du couronnement de la reine, puis pendant la scène du bûcher ; la dernière scène, celle de l’arrivée de Lancelot au couvent où s’est retirée Guenièvre est illustrée par un autre fragment, chanté par des voix féminines cette fois. Plus fantaisistes et souvent associés à une modalité et à un accompagnement instrumental postmoderne, les chœurs de voix féminines aiguës participent aussi d’un imaginaire convoquant une certaine idée du merveilleux. Ils interviennent d’ailleurs le plus souvent lors de scènes convoquant le surnaturel ou la magie (visions de Jof dans Le Septième Sceau ou de Perceval dans Knights of the Round Table, invocations de Merlin puis Morgane dans Excalibur). Les exemples de ce genre foisonnent26 et témoignent d’une tendance généralisée au cliché : pour « faire médiéval », plusieurs recettes s’imposent, comme autant de traits stylistiques éventuellement combinables entre eux.

Enfin, le « folklorisme » musical fait parfois appel à une relecture ultérieure du Moyen Âge. Conscient du filtre opéré par le Moyen Âge central sur le temps réel de l’action et souhaitant le conserver27, le réalisateur John Boorman introduit ce filtre supplémentaire à Excalibur, associant Wagner à Carl Orff, dans un souci « symbo­lique »28. Sur le premier et les choix opérés dans ses œuvres, il s’est longuement expliqué lors d’un entretien accordé à Michel Ciment :

J’ai vu le Ring à Bayreuth dans la mise en scène de Patrice Chéreau et cela m’a particulièrement frappé ; les impressions ressenties m’ont habité longtemps. La musique de Wagner m’a servi de guide dans les premières étapes de mon travail. Je ne pensais pas l’utiliser au départ, mais peu à peu, en accord avec Trevor Jones, j’ai décidé de l’employer pour certains passages et elle s’est très bien intégrée à sa propre partition. Nous avons choisi ensemble les extraits de « La Mort de Siegfried », du Crépuscule des Dieux, le prélude de Tristan et Iseult pour l’histoire d’amour et celui de Parsifal que j’ai toujours aimé, avec ces cordes ineffables qui élèvent l’esprit vers un plan supérieur et qui accompagnent dans le film la quête du Graal. D’une certaine façon, l’esprit de Wagner a collaboré au film29.

Wagner a ainsi été choisi pour les mythes qu’il a mis en scène dans ses opéras : ainsi le graal est-il évoqué par le prélude de Parsifal et le mythe de l’amour coupable par celui de Tristan, en une association étonnante et quelque peu confuse des deux couples transgresseurs Tristan/Yseult et Lancelot/Guenièvre. Les apparitions de l’épée sont accompagnées du thème de la marche funèbre de Siegfried dans le Crépuscule des Dieux. En ce qui concerne Orff, ce sont la référence – fort lointaine il faut l’avouer, sur le plan musical en tout cas – à l’univers médiéval des Carmina Burana et la force et l’énergie musicale dégagées par O Fortuna qui ont été déter­minantes, toujours de l’aveu du réalisateur30. Comme d’autres avant lui, Trevor Jones utilise la musique comme un leitmotive. Près de trente ans après Knights of the Round Table, les techniques compositionnelles des musiciens de cinéma n’ont, fina­lement, guère changé – et ressemblent à s’y méprendre aux techniques des compo­siteurs d’opéra du XIXe siècle : la musique y accompagne, voire y anticipe, émotions et situations.

De cet ensemble à première vue assez hétérogène, quelques lignes directrices paraissent finalement vouloir se dessiner. Quel que soit le parti pris initial – abstrac­tion, réalisme ou folklorisme – les films médiévaux semblent toujours vouloir faire une place à la musique médiévale en appelant à un imaginaire fait de clichés divers : timbres instrumentaux caractéristiques (cordes pincées, sons tenus de vielle à roue ou de bourdons de cornemuses), lignes mélodiques souvent volontairement simples voire simplistes, pensée sacrifiant à l’archaïsme de la modalité, ou motifs issus des musiques populaires. Si quelques œuvres se détachent par un réalisme quasi documentaire, c’est surtout par leur sujet (Vision) ou par une esthétique à laquelle le renouveau de la musique médiévale des années 70, époque de l’émergence d’en­sembles spécialisés comme le Clemencic Consort, n’est certainement pas étranger (Blanche, Perceval le Gallois). Tout se passe comme si, pour « faire médiéval », il fallait ajouter la musique à la longue liste des topoï qui, d’ailleurs, s’accompagnaient souvent au Moyen Âge de musiques : tournoi, bataille, banquet, couronnement, bûcher, scènes intimes. Pour autant, cette musique, qu’elle soit ou non authentique, est chargée de symboles qui marquent son passage dans le temps, et se révèle nourrie à des pratiques compositionnelles puisant notamment au Romantisme et au premier XXe siècle. Thèmes utilisés à la manière de leitmotives (Miklós Rósza, Trevor Jones, James Horner) ou subtiles associations de timbres, d’échelles ou de motifs (Erik Nordgren), les musiques de films « médiévaux » parlent, somme toute, au moins autant de leur présent que de leur passé. Elles portent en elles une multiplicité de références, auxquelles les spectateurs – et pas seulement les spectateurs médié­vistes – sont amenés à réagir, voire à s’identifier. Car jouer avec les références jusqu’à se les approprier, les recomposer, en somme, fait aussi partie des enjeux du cinéma.

Annexe – Tableau récapitulatif du corpus étudié

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1 François Amyde la Bretèque, Le Moyen Âge au cinéma. Panorama historique et artistique, Paris : Armand Colin, 2015, p. 8, n. 11.

2 Ibid., p. 211.

3 C’est seulement à partir du IXe siècle que l’on commença à noter, à l’aide de neumes, les mélodies liturgiques jusque-là transmises oralement.

4 J’ai ainsi écarté les récents King Arthur d’Antoine Fuqua et Tristan & Isolde de Kevin Reynolds, qui situent leur action à l’époque romaine, de

5 Le tableau annexé à ces pages recense les films mentionnés.

6 Une alternative à cet effet, très largement utilisée, met en œuvre des chœurs de voix féminines, nous le verrons plus loin.

7 La mélodie daterait du XIIIe siècle, ce qui est compatible avec les premières mentions historiques du héros, mais nullement avec les années 1190

8 Je reviendrai sur ce point.

9 Les deux films, dont les partis pris musicaux se rejoignent sur le fond, sont d’ailleurs exactement contemporains.

10 John Haines (Eight Centuries of Troubadours and Trouvères. The Changing Identity of Medieval Music, Cambridge : Cambridge University Press, 2004

11 La pièce avait été écrite par le réalisateur pour servir d’exercice à ses élèves. Voir Ingmar Bergman, Images, Paris : Gallimard, 1992, p. 

12 Seule la seconde intervention du répons O quam preciosa est extradiégétique, bien que chantée par la même voix que la première fois. Toutes les

13 Voir Isabelle Ragnard, « Le prologue du film Ivanhoe (1952) de Richard Thorpe : avatar musical et cinématographique d’un récit de ménestrel », in

14 Il s’agit de la rotruenge Ja nus hons pris et de l’alba Reis glorios. Voir à ce propos Tony Thomas, Music for the Movies, Los Angeles :

15 Il s’agit de la première nouvelle de la première journée.

16 Si aucune étude n’a été consacrée au traitement purement musical du film, on trouvera quelques éléments très généraux dans les articles de Maria

17 La célèbre canso Can veil la lauzeta mover de Bernart de Ventadorn et l’estampie Chominciamento di joia font partie de ce fonds mélodique.

18 On y trouve notamment des éléments de décors évoquant les enluminures médiévales, de même que s’y perçoit la recherche d’une certaine symbolique

19 Dans ce film, qui prend de grandes libertés avec les faits historiques, la référence à la cornemuse – seule de nature à évoquer le temps du film 

20 Cet autre volet de la « trilogia della vita » pasolinienne, ne lésine en effet pas sur les instruments historiques (vièle, vièle à roue, muse

21 Voir notamment à ce sujet John Haines, Music in Films on the Middle Ages. Authenticity vs. Fantasy, New York/London : Routledge, coll. « 

22 Parmi ces timbres, on remarque particulièrement les cordes pincées des harpes et des cithares et les longues tenues de vielle à roue.

23 Ainsi de nombreuses scènes intimes montrent-elles des chanteurs s’accompagnant au luth ou, moins fréquemment bien que cet instrument soit plus

24 On retrouve ce même mode de la dans la mélodie chantée par la paysanne dans A Walk with Love and Death au moment de l’arrivée de Heron de Foix au

25 Le film se passe en 1358, au moment des révoltes paysannes qui ont agité la France durant la Guerre de Cent Ans.

26 Il n’est pas jusqu’au loufoque Monty Python and the Holy Grail, comédie à sketches incluant des musiques pastiches allant des madrigaux de l’

27 Voir Michel Ciment, John Boorman, un visionnaire en son temps, Paris : Calmann-Lévy, 1985, p. 196.

28 Michel Ciment, op. cit., p. 185-201.

29 Michel Ciment, op. cit., p. 200.

30 Ingmar Bergman avouait lui aussi avoir écouté les Carmina Burana de Carl Orff à maintes reprises à l’époque de la conception du Septième sceau.

Amy de la Bretèque, François, Le Moyen Âge au cinéma. Panorama historique et artistique, Paris : Armand Colin, 2015.

Bauer Marion, Peyser, Ethel, How Music Grew: From Prehistoric Times to the Present Day, New York : G. P. Putnam, 1936.

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1 François Amy de la Bretèque, Le Moyen Âge au cinéma. Panorama historique et artistique, Paris : Armand Colin, 2015, p. 8, n. 11.

2 Ibid., p. 211.

3 C’est seulement à partir du IXe siècle que l’on commença à noter, à l’aide de neumes, les mélodies liturgiques jusque-là transmises oralement.

4 J’ai ainsi écarté les récents King Arthur d’Antoine Fuqua et Tristan & Isolde de Kevin Reynolds, qui situent leur action à l’époque romaine, de même que King Arthur. The Legend of the Sword de Guy Ritchie, qui met en scène le mythe dans un univers de fantasy anhistorique.

5 Le tableau annexé à ces pages recense les films mentionnés.

6 Une alternative à cet effet, très largement utilisée, met en œuvre des chœurs de voix féminines, nous le verrons plus loin.

7 La mélodie daterait du XIIIe siècle, ce qui est compatible avec les premières mentions historiques du héros, mais nullement avec les années 1190, époque – selon l’évolution ultérieure du mythe à la fin du XVIe siècle – à laquelle se passe le film.

8 Je reviendrai sur ce point.

9 Les deux films, dont les partis pris musicaux se rejoignent sur le fond, sont d’ailleurs exactement contemporains.

10 John Haines (Eight Centuries of Troubadours and Trouvères. The Changing Identity of Medieval Music, Cambridge : Cambridge University Press, 2004, p. 205-210) évoque certaines de ces assimilations. On se reportera aussi aux études de Donald Grout (A History of Western Music, Ney York : W. W. Norton, 1980, p. 66) ainsi que de Marion Bauer et Ethel Peyser (How Music Grew: From Prehistoric Times to the Present Day, New York : G. P. Putnam, 1936, p. 96). Pour une approche plus directement liée à l’interprétation et à la restitution, voir John Haines, « The Arabic Style of Performing Medieval Music », in Early music, n°29, 2001, p. 369-378.

11 La pièce avait été écrite par le réalisateur pour servir d’exercice à ses élèves. Voir Ingmar Bergman, Images, Paris : Gallimard, 1992, p. 221-231.

12 Seule la seconde intervention du répons O quam preciosa est extradiégétique, bien que chantée par la même voix que la première fois. Toutes les autres musiques sont en lien direct avec la narration.

13 Voir Isabelle Ragnard, « Le prologue du film Ivanhoe (1952) de Richard Thorpe : avatar musical et cinématographique d’un récit de ménestrel », in Le Moyen Âge en musique. Interprétations, transpositions, inventions, Élisabeth Gaucher-Rémond (éd.), Rennes : Presses Universitaires de Rennes, coll. « Interférences », 2013, p. 57-82.

14 Il s’agit de la rotruenge Ja nus hons pris et de l’alba Reis glorios. Voir à ce propos Tony Thomas, Music for the Movies, Los Angeles : Silman-James Press, 1997, p. 130.

15 Il s’agit de la première nouvelle de la première journée.

16 Si aucune étude n’a été consacrée au traitement purement musical du film, on trouvera quelques éléments très généraux dans les articles de Maria Tortajada (« L’exception médiévale. Perceval le Gallois d’Eric Rohmer » in Équinoxe, n°16, Automne 1996, p. 115-130) et de Joseph Marty (« "Perceval le Gallois" d’Eric Rohmer : un itinéraire roman », in Les Cahiers de la Cinémathèque – Le Moyen Âge au cinéma, n°42/43, 1985, p. 125-132).

17 La célèbre canso Can veil la lauzeta mover de Bernart de Ventadorn et l’estampie Chominciamento di joia font partie de ce fonds mélodique.

18 On y trouve notamment des éléments de décors évoquant les enluminures médiévales, de même que s’y perçoit la recherche d’une certaine symbolique (croix, oiseaux, lieux clos).

19 Dans ce film, qui prend de grandes libertés avec les faits historiques, la référence à la cornemuse – seule de nature à évoquer le temps du film – est double et constitue aussi un cliché « celte » correspondant au sujet traité : l’indépendance de l’Écosse.

20 Cet autre volet de la « trilogia della vita » pasolinienne, ne lésine en effet pas sur les instruments historiques (vièle, vièle à roue, muse, flûte, citole et cornemuse) lors de scènes festives.

21 Voir notamment à ce sujet John Haines, Music in Films on the Middle Ages. Authenticity vs. Fantasy, New York/London : Routledge, coll. « Routledge Research in Music », 2014, p. 40-43.

22 Parmi ces timbres, on remarque particulièrement les cordes pincées des harpes et des cithares et les longues tenues de vielle à roue.

23 Ainsi de nombreuses scènes intimes montrent-elles des chanteurs s’accompagnant au luth ou, moins fréquemment bien que cet instrument soit plus authentique, à la harpe. Un exemple parmi d’autres est la scène de la partie d’échecs entre Elaine et Lancelot dans Knights of the Round Table, scène au cours de laquelle un harpeur chante pour le jeune couple.

24 On retrouve ce même mode de la dans la mélodie chantée par la paysanne dans A Walk with Love and Death au moment de l’arrivée de Heron de Foix au château où il ren­contrera sa future dame, Claudia. Pour une approche de la modalité médiévale, on se reportera aux études spécialisées, notamment Gustave Reese, Music in the Middle Ages, New York/London : W. W. Norton & Company, 1940, en particulier p. 149-156. Pour ses prolongements à la Renaissance, on consultera Karol Berger, « Concepts and Developments in Music Theory », in European Music 1520-1640, Haar James (éd.), Woodbridge : The Boydell Press, 2006, p. 304-328.

25 Le film se passe en 1358, au moment des révoltes paysannes qui ont agité la France durant la Guerre de Cent Ans.

26 Il n’est pas jusqu’au loufoque Monty Python and the Holy Grail, comédie à sketches incluant des musiques pastiches allant des madrigaux de l’époque Tudor au cancan et aux claquettes qui n’héberge un fragment de « Pie Jesu », fantaisiste et parodique celui-ci, qui accompagne l’arrivée de la sainte Grenade d’Antioche. Cette relique doit permettre aux chevaliers de se débarrasser du lapin tueur gardien de l’entrée de la grotte dans laquelle Joseph d’Arimathie a gravé des indications précieuses pour leur quête.

27 Voir Michel Ciment, John Boorman, un visionnaire en son temps, Paris : Calmann-Lévy, 1985, p. 196.

28 Michel Ciment, op. cit., p. 185-201.

29 Michel Ciment, op. cit., p. 200.

30 Ingmar Bergman avouait lui aussi avoir écouté les Carmina Burana de Carl Orff à maintes reprises à l’époque de la conception du Septième sceau. Voir Ingmar Bergman, op. cit., p. 221-231.

Ex. 1 : Motif de la marche des chevaliers

Ex. 1 : Motif de la marche des chevaliers

Ex. 2 : Première présentation du motif de l’épée

Ex. 2 : Première présentation du motif de l’épée

Ex. 3 : Première transformation du motif (tentatives infructueuses de Mordred)

Ex. 3 : Première transformation du motif (tentatives infructueuses de Mordred)

Ex. 4 : La mélodie du Dies iræ

Ex. 4 : La mélodie du Dies iræ

Ex. 5 : La mélodie liée à la présentation de la lance sanglante dans Perceval le Gallois

Ex. 5 : La mélodie liée à la présentation de la lance sanglante dans Perceval le Gallois

Ex. 6 : Le début du répons O preciosa et deux présentations différentes du motif principal de Vision

Ex. 6 : Le début du répons O preciosa et deux présentations différentes du motif principal de Vision

Anne Ibos-Augé

Anne Ibos-Augé, ancienne élève du CNSMDP, où elle obtient 3 prix (Histoire de la musique, Esthétique, Analyse), est docteur en musicologie et agrégée de musique. Auteur d’un ouvrage intitulé Chanter et lire dans le récit médiéval, d’une base de données en ligne sur les refrains médiévaux (REFRAIN), en cours d’élargis­sement au répertoire des chansons, ainsi de plusieurs contributions sur la musique médiévale, elle poursuit des travaux sur les répertoires des XIIe-XIVe siècles, les chansonniers de trouvères, et les rapports entre littérature, musique et société aux XIIIe et XIVe siècles. Elle travaille à l’édition et à l’étude d’un traité de dévotion anonyme du XIIIe siècle muni de citations lyriques, qui paraîtra aux éditions Champion. Chercheure associée au CESCM (Poitiers), chercheure titulaire à l’IReMus (Paris), membre de la SFM, elle est actuellement ATER à Sorbonne Uni­versité, où elle enseigne l’Histoire de la musique médiévale, l’analyse et le commentaire d’écoute.