« I’m not dead yet » : les séries médiévalistes ou le moyen de repousser la mort

Justine Breton

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Justine Breton, « « I’m not dead yet » : les séries médiévalistes ou le moyen de repousser la mort », Tropics [En ligne], 9 | 2020, mis en ligne le 01 décembre 2020, consulté le 21 décembre 2024. URL : https://tropics.univ-reunion.fr/1756

Le médiévalisme occupe aujourd’hui une part importante des productions audiovisuelles, tant au cinéma qu’à la télévision. Par les moyens dont ils bénéficient désormais et par le public croissant qu’ils attirent, ces deux médias constituent des cadres narratifs privilégiés pour donner vie à un Moyen Âge réinventé1. Les séries télévisées, tout particulièrement, choisissent de mettre en scène un Moyen Âge partiellement libéré des contraintes de temps, qui est en constante évolution mais ne s’achève jamais véritablement. L’étendue et la fragmentation du format sériel per­mettent un renouvellement de l’intrigue2, donnant l’impression d’un arrêt dans le temps et d’un Moyen Âge qui s’éternise, pour le plus grand plaisir des spectateurs. Pour éviter que cette impression de longévité n’implique de stagnation dans le récit, le rythme narratif se doit d’être soutenu, mettant ainsi régulièrement en péril les personnages.

En effet, les protagonistes des séries médiévalistes sont hantés par la présence constante de la mort, qui apparaît comme un élément fondamental du quotidien médiéval, au même titre que les châteaux et les chevaliers. Pour ces productions, la mort fait partie du décor, au sens où elle est toujours visible et permet aux person­nages d’évoluer, mais au sens également où elle n’occupe que très rarement le devant de la scène. La mort est un prétexte narratif plus qu’une fin en soi. L’intrigue est motivée par cette menace constante, qui semble paradoxalement s’abattre peu sur les personnages : l’on craint de mourir, mais l’on ne meurt pas vraiment. Cet article cherche à interroger les moyens narratifs et médiatiques permettant de réinventer ce Moyen Âge immortel dans les productions télévisées médiévalistes, à travers la représentation paradoxale de la mortalité médiévale3. Sans pouvoir prétendre à l’exhaustivité, cette étude s’intéresse à un large panel de séries télévisées occi­dentales consacrées à la recréation du Moyen Âge, du drame à la comédie, dans lesquelles la mort est à la fois mise en lumière et mise à l’écart.

Passé, présent, vie et mort : se libérer des contraintes chronologiques

Les séries médiévalistes entretiennent un rapport au temps particulier, en jouant avec les contraintes chronologiques et la linéarité de l’histoire4. En tant que période achevée de l’humanité, le Moyen Âge constitue un terrain de jeu à la fois clos et libre, qui permet une grande exploration narrative. Il s’agit par ailleurs d’une période suffisamment éloignée de notre situation contemporaine pour permettre un certain dépaysement, mais suffisamment familière pour que le spectateur puisse s’identifier aux protagonistes, et le tout dans un contexte suffisamment large pour offrir de vastes possibilités de récit. L’histoire et la littérature médiévales constituent une source d’inspiration pour les séries, sans restreindre pour autant leur développement narratif.

Les séries médiévalistes ouvrent une voie vers un Moyen Âge réinventé, où le temps n’a plus nécessairement un déroulement traditionnel. Ainsi la série Vikings (History, 2013-2020) propose-t-elle une version romancée et très rythmée de l’histoire viking, qui s’appuie sur des bribes factuelles pour composer une narration plus large. Analysant les usages de l’histoire dans cette production, Joshua J. Mark explique : « In order to create a seamless narrative and engaging story arc, histo­rical events are often telescoped, combined, compressed, or otherwise altered »5. Le chef semi-légendaire Ragnar Lothbrok et le jarl Rollon peuvent avoir près de cent ans d’écart si l’on se fie aux diverses sources médiévales ; ils deviennent ici des frères à la destinée exceptionnelle. Les faits sont rapprochés et réécrits pour apporter une impulsion au récit et former un élan narratif susceptible d’intéresser les téléspectateurs. Même si Vikings est créée pour la chaîne History, aux États-Unis et au Canada, il s’agit avant tout d’un programme de divertissement, et non d’un documentaire : pour la série, l’histoire est une source d’inspiration, et non un guide. En considérant l’histoire et la littérature médiévales comme de vastes catalogues où les scénaristes peuvent piocher leur inspiration, il est plus aisé de comprendre les superpositions, les raccourcis et parfois les oublis historiques majeurs opérés dans les séries médiévalistes. Le temps historique n’est pas considéré comme linéaire, mais comme une base de données fragmentée, dont les scénaristes et réalisateurs ne retirent que les éléments jugés pertinents d’un point de vue narratif. Avant d’être un programme historique, une série médiévaliste demeure un récit, et est en consé­quence créée selon des principes diégétiques.

La distinction entre véracité historique et élan narratif est plus évidente encore lorsqu’il s’agit d’un programme de fantasy, comme la série animée Désenchantée (Netflix, depuis 2018) – même si, dans le cas de séries adaptées de sagas de fantasy à prétention historicisante, comme Game of Thrones (HBO, 2011-2019), les affir­mations de véracité historique ne manquent pas, y compris dans un univers peuplé de dragons6. La fantasy, en tant qu’espace narratif fictif où règne la magie, ne semble a priori pas soumise aux mêmes règles de fonctionnement, ni aux limites physiques, spatiales et temporelles que connaît notre réalité. Un personnage de premier plan comme Gandalf, dans Le Seigneur des Anneaux (1954-1955), a beau disparaître, il ne meurt pas tout à fait : son existence n’est que brièvement interrompue pour pou­voir accéder à un niveau supérieur de conscience et de puissance, et ainsi continuer à aider les protagonistes dans leur quête. Pour la fantasy, la mort ne met pas néces­sairement un terme à l’aventure, mais constitue un rebondissement narratif potentiel. Ce modèle transparaît largement dans les séries médiévalistes, qu’elles soient elles-mêmes présentées comme des œuvres de fantasy ou non. En s’émancipant de l’obli­gation de linéarité historique, et en puisant ponctuellement dans les codes de la fantasy, les scénaristes de séries médiévalistes ne sont plus limités par les contraintes traditionnelles de développement d’un personnage : naissance > vie plus ou moins longue > décès impliquant la disparition du personnage. La mort demeure, parfois en tant que menace accrue, mais ne constitue pas l’aboutissement de la narration. Elle n’est plus qu’un élément biographique parmi d’autres, qu’il est possible d’alté­rer pour dynamiser le récit.

L’omniprésence de la mort médiévale

Un paradoxe apparaît dans le traitement de la mort par les séries médiévalistes. À la fois omniprésente, car considérée comme une caractéristique intrinsèque de l’époque médiévale, la mort voit ses conséquences fréquemment effacées pour les personnages – ainsi que pour les spectateurs. La représentation du Moyen Âge s’accompagne généralement de remarques sur la difficulté des conditions de vie pour tous, sur le manque d’hygiène, sur les risques liés aux épidémies et aux conflits incessants, ou encore sur la mortalité infantile élevée. Ces considérations participent de l’image clichée des « Âges sombres », limitant la période médiévale à un temps d’obscurantisme et de violence. Dans cette perspective, la brutalité apparaît parfois comme une donnée essentielle de la représentation de l’époque : puisqu’il s’agit d’une période jugée « barbare », alors la mort doit être un élément marquant du pay­sage médiévaliste. Cette représentation dépasse bien entendu les limites des séries et se retrouve régulièrement dans la littérature, dans les films, et même, fut un temps, dans les études scientifiques consacrées au Moyen Âge. Si la recherche a bien évolué sur la question, apportant de vives nuances à des portraits souvent trop négatifs de la période, l’imaginaire collectif tend à conserver l’image d’un Moyen Âge brutal et sans pitié, où la vie est nécessairement fragile. Certaines séries ont d’ailleurs construit une partie de leur notoriété sur cette propension à afficher la brutalité du contexte médiévalisant, Game of Thrones en tête. Ici, la mort est non seulement admise en tant que menace permanente, mais contribue même à la renommée du programme, en présentant des décès toujours plus surprenants, plus massifs, plus cruels.

En tant que menace constante, la mort rompt l’inertie des personnages. Les forts taux de mortalité, par blessure, exécution, famine ou maladie, constituent un topos des séries médiévalistes : La Vipère noire (BBC One, 1983-2002) multiplie les exemples, en évoquant ou mettant directement en scène des empoisonnements, des décès dus à la peste noire, des décapitations par erreur, des condamnations pour sorcellerie, etc. La mort représente une menace concrète et polymorphe pour les protagonistes. Si certaines séries réduisent le nombre de causes mortelles, elles conservent toutefois la prédominance de ce thème. C’est ainsi le cas dans les séries médiévalistes centrées sur la guerre, où les affrontements et les trahisons fournissent l’essentiel des décès à l’intrigue, comme dans la série Knightfall (History, depuis 2017), consacrée aux Templiers. Les protagonistes sont en grande majorité des chevaliers et des seigneurs, si bien que leur quotidien implique un grand nombre de combats susceptibles d’être mortels. Dès lors, même fréquemment évitée, la mort fait partie du quotidien de ces personnages. Dans des séries médiévalistes centrées sur l’aventure, il s’agit également d’une menace fréquente, moins sous la forme de guerres que via des accidents, comme dans Désenchantée : si les personnages combattent finalement peu, ils passent toutefois une grande partie de leur temps à l’écran à courir pour échapper à divers périls – naturels, humains ou monstrueux, dans des aventures toutes plus absurdes les unes que les autres. Là encore, la mort représente une possibilité tangible dans l’intrigue, fréquemment évoquée à défaut d’être montrée.

Même les séries médiévalistes aux ambitions humoristiques sont concernées par cette prédominance de thèmes morbides, où ils provoquent alors le rire. Des programmes comme Kaamelott (M6, 2005-2009) font de la mort un élément si banal qu’elle ne suscite plus nécessairement de réaction émotionnelle des personnages,
en particulier lorsqu’il s’agit de constater le décès d’un simple serviteur7. Si les membres de la noblesse conservent une forme de révérence face aux défunts, le peuple affiche quant à lui une résignation inquiétante devant les taux de mortalité infantile8 : même hors contexte guerrier, la mort appartient pleinement au quotidien médiéval. Les questions de manque d’hygiène et les balbutiements de la médecine, les condi­tions climatiques qui affectent les récoltes, la violence de certains seigneurs et les invasions constituent autant de facteurs aggravants, que les personnages interrogent sans pouvoir véritablement les combattre. L’inertie du peuple face à ces conditions est ici traitée sur le mode parodique : le décalage entre la gravité de la situation et l’absence de préoccupation du monde paysan prête à sourire, tant il est poussé à l’excès pour paraître incompréhensible au spectateur du XXIe siècle. Bien entendu, à toute époque, y compris au Moyen Âge, la mort entraîne des réactions émotion­nelles. Contrairement à ce que l’on a longtemps pu penser, les parents médiévaux sont bien affectés par la perte d’un enfant, même s’il s’agit d’une tragédie plus fréquente9. Le traitement humoristique de la mortalité dans des séries comme Kaamelott permet de souligner le caractère universel des sentiments humains, y compris dans ce que suscite – ou devrait susciter – la mort. L’humour noir invite à dédramatiser une menace permanente, et à établir un contraste entre d’une part des personnages jugés progressistes et proches du spectateur, comme le roi Arthur, atterré par la mortalité de ses sujets, et d’autre part la masse paysanne médiévale, désensibilisée par une confrontation quotidienne à la mort.

Mais une mort qui n’est que temporaire

Toutefois, dans un nombre étonnant d’occurrences, cette mort n’apparaît en réalité que comme un obstacle temporaire, bien vite contourné par les personnages qui échappent de fait à leur mortalité. La série Galavant (ABC, 2015-2016), conçue pour un public familial, ne propose aucune effusion de sang ni confrontation trop directe avec un réalisme morbide. À l’inverse, la mort y est repoussée ou voilée pour correspondre aux codes de la chaîne ABC, filiale de The Walt Disney Company depuis 1996. La série, caractérisée par un style à la fois musical et humoristique, met en scène une quête médiévaliste traditionnelle, avec preux chevalier, princesse à sauver, sorcière et dragon, mais le tout détourné de façon burlesque. Même la guerre y devient un prétexte comique. Quelques instants avant une terrible bataille, le héros chante l’imminence de la mort dans une parodie épique, mais est bien vite contredit par son entourage, conscient que la menace guerrière n’est qu’un leurre de la série :

Galavant [chant] : It’s a good day to die.
Roi de Valence : We won’t, there’s one more episode.
Galavant [chant] : But still, we could die ! […]
Tous [chant] : It’s a good day to die !
Reine de Valence [chant] : Oh please, this isn’t Game of Thrones !
Gareth [chant] : We’re not gonna die. Let’s end the song and grow some stones, and fight10 !

La série propose ainsi un regard décalé sur sa propre création, avec des per­sonnages qui brisent régulièrement le quatrième mur et commentent comme ici les conditions de leurs aventures. Le spectateur est rassuré par les protagonistes eux-mêmes, qui rompent l’illusion diégétique pour rappeler le fonctionnement tradi­tionnel de la série destinée au grand public : l’ennemi sera nécessairement vaincu et les héros victorieux, si bien que la mort n’apparaît que comme une menace conven­tionnelle.

Une autre méthode d’évitement consiste à faire de la mort une simple incompré­hension. Dans Kaamelott, les décès ne sont bien souvent que des rumeurs infondées, justifiées par le manque de moyens de communication lors de la période médiévale. Les bardes n’hésitent pas à chanter la mort de souverains bien vivants, dans l’espoir de récolter plus d’argent à la fin de leur prestation11. La série prend la mort pour prétexte pour établir une distinction entre artiste et journaliste : le barde doit a priori transmettre des nouvelles du monde, mais il reste avant tout un créateur, libre d’employer des licences poétiques peu scrupuleuses. Les problèmes de communi­cation ne s’arrêtent pas là : certains seigneurs, comme Jacca ou même le chevalier Lancelot, se terrent dans leur habitation si longtemps que la cour finit par considérer qu’ils sont décédés, par habitude et logique12. En effet, la prédominance des risques mortels dans le cadre médiévaliste invite tout naturellement les personnages à consi­dérer une absence prolongée comme une preuve de mort. Kaamelott multiplie les exemples de faux décès, qui sont chaque fois d’autant plus crédibles pour les per­sonnages que le contexte médiévaliste est considéré comme dangereux. La rapidité de la rumeur et la difficile communication font le reste. Ainsi le peuple de Carmélide croit-il à la mort de son seigneur, Léodagan, lorsque son fils Yvain choisit de se faire surnommer « l’Orphelin de Carmélide »13 – après avoir confondu les mots « orphe­lin » et « éléphant ». La fausse mort constitue un topos des romans de chevalerie. Dans Cligès de Chrétien de Troyes, par exemple, la reine Fénice met en place un lourd stratagème pour échapper à son mariage avec Alis, et pour pouvoir ainsi vivre secrètement son amour avec Cligès une fois que tous la croiront morte. Si le subterfuge finit par être démasqué, il permet toutefois aux amants de s’échapper. Ce procédé, habile moyen de maintenir la tension dramatique, est ensuite régulièrement adopté au théâtre – avec des fins plus ou moins heureuses, comme dans Roméo et Juliette de Shakespeare. Comme dans la littérature médiévale, la fausse mort est souvent employée volontairement par des amants malheureux, ou comme outil de manipulation politique, en faisant croire au décès d’un souverain absent pour mieux s’emparer de son trône. Ainsi s’agit-il d’un procédé complexe, mis en place par des personnages aux motifs sérieux. Au contraire, dans Kaamelott, l’emploi de la fausse mort ne repose de façon parodique que sur une incompréhension lexicale, avec toute l’absurdité que cela implique.

Si certaines séries emploient des moyens détournés pour effacer la mort, le principe d’atténuation des conséquences reste similaire. L’anti-héros de La Vipère noire a beau mourir empoisonné à la fin de la première saison – tout comme une grande partie de la cour royale –, il revient sous une autre forme dans les épisodes suivants, diffusés trois ans plus tard14. Dans cette série humoristique britannique, chaque saison présente une époque différente, mais reprend des personnages simi­laires dont le comportement est adapté à l’évolution du contexte. Rowan Atkinson interprète ainsi Edmund Blackadder dans la première saison, se déroulant à la fin du XVe siècle, avant de revenir sous le titre de Lord Edmund Blackadder, membre de la cour d’Élisabeth Ire, dans la saison suivante. Puisque le personnage est appelé à se « réincarner » dans un autre cadre historique, sa mort importe finalement peu, et ne semble d’ailleurs que temporaire pour le spectateur15.

Quelles conséquences pour la mort ?

Il s’agit dans tous ces exemples de séries humoristiques, où la mort est sans cesse repoussée car il s’agit d’abord d’un sujet grave, difficile à aborder sur un ton léger et pour un public familial – même via l’éloignement temporel permis par le contexte médiévaliste. Dès lors, les scénaristes et réalisateurs privilégient des per­sonnages qui ne sont pas vraiment morts, ou du moins ne le sont-ils que brièvement, et sans réelle gravité. Cette atténuation des conséquences mortelles est d’autant plus aisée à mettre en place que les séries télévisées peuvent rapidement faire revivre des personnages. C’est ce qu’expliquent Emory Daniel Jr. et David Westerman, dans leur étude sur les réactions émotionnelles du public face à la mort de Jon Snow dans Game of Thrones16 : « Unlike a real death, there are always possibilities for bringing back a ‘dead’ character in a TV show »17. L’application des phases du deuil aux attitudes des fans souligne à la fois le lourd investissement émotionnel du public envers la série et la conscience collective que, même dans une production comme Game of Thrones, un espoir de retour reste permis. Les séries télévisées suivent en ce sens une logique rappelant celle du jeu vidéo, où la mort du joueur-personnage n’est qu’un obstacle éphémère, bientôt contourné par la possibilité de débuter une nouvelle partie. La mort reste un élément décisif de la structure de jeu, puisqu’elle implique généralement l’échec, total ou partiel, du parcours de jeu. Cependant, cet échec reste relatif car le jeu invite par sa nature-même au renouvellement de l’ex­périence, et permet de recommencer l’aventure. Les séries médiévalistes semblent s’inspirer de ce fonctionnement, en n’intégrant à l’intrigue que des morts tempo­raires.

Certes, le décès d’un personnage peut avoir des conséquences directes sur la narration. Dans Galavant, l’écuyer Sid décide de risquer sa vie dans l’espoir d’obte­nir sa rédemption après avoir involontairement tué le chevalier Galavant18. Même si ce dernier finit par survivre à une épée plantée dans la poitrine, la culpabilité de son écuyer est telle qu’il préfère partir. Bien entendu, il s’agit là encore d’un ressort narratif : en quittant le groupe de protagonistes, Sid peut reparaître quelques épisodes plus tard à la tête d’une nouvelle armée, et ainsi venir en aide aux héros dans leur affrontement final. Le fait d’avoir provoqué la mort de son ami pousse le personnage à l’action et surtout à l’indépendance, ce qui ne lui était pas permis sur le plan narratif jusqu’ici. Par effet de réalisme, la mort affecte l’entourage du défunt plus que le défunt lui-même. Dans Kaamelott, la mort supposée du chevalier Perceval incite le roi et les membres de la Table ronde à se focaliser plus sérieusement sur la quête du Graal. Sa disparition pousse ses amis à donner un sens plus profond à leur existence en se consacrant à leur mission divine. Le deuil contraint les personnages à faire face à leur propre mortalité et donc à réagir, mais la motivation retrouvée n’est que de courte durée : la révélation de la survie de Perceval, plutôt que de réjouir son entou­rage, brise tous les efforts débutés. Dépité d’avoir eu à gérer un deuil inutile, et par­ticulièrement absurde, le roi Arthur se tourne vers la jeune génération de chevaliers pour nuancer le message d’espoir qu’il venait de leur livrer : « Oubliez ce que je vous ai dit : le Graal, c’est de la merde »19. Si le décès d’un personnage pousse les autres à l’action, l’absence de risque mortel entraîne un sentiment d’inertie. La mort joue donc un rôle moteur dans la narration, même lorsqu’il ne s’agit que d’une rumeur.

Toutefois, le plus souvent, les personnages qui frôlent la mort – qu’ils décèdent temporairement avant de revenir à la vie, ou qu’ils ne fassent que risquer leur vie – restent peu affectés par cet événement. Dans les séries médiévalistes, l’idée de la mort est si ancrée dans le quotidien qu’elle n’entraîne pas de réaction particulière des protagonistes. Nulle conversion mystique suite à une expérience de mort immi­nente, nul désir de changer sa vie pour le mieux : si les revenants affichent parfois des convictions marquées, elles ne sont pas dues à la proximité de la mort. Dans Game of Thrones, Sandor Clegane survit miraculeusement après un combat contre Brienne, mais il ne tire de cette expérience qu’une haine renouvelée pour l’espèce humaine20. La proximité de la mort confirme ses opinions et n’entraîne pas de véri­table changement dans son existence. Le personnage fait l’expérience de la mort, puis la dépasse sans se retourner. De même, son frère Gregor est maintenu en vie de façon artificielle par des tentatives scientifiques conçues sur le modèle des expé­riences du Dr. Frankenstein, mais sa survie ne fait qu’exacerber ses caractéristiques premières. Transformé en zombie à peine plus obéissant, il conserve une force surhumaine et une haine envers Sandor, qui finit d’ailleurs par provoquer la chute des deux frères21. Lors de leur ultime affrontement, tous deux refusent de mourir, si bien que la mort se trouve repoussée à l’extrême. La séquence, entrecoupée de scènes de destruction massive de la ville sous les flammes du dragon de Daenerys, mêle les registres épique – par le caractère extraordinaire du combat –, tragique – par la résolution violente d’années de rancœur entre les deux frères –, pathétique – par la longue souffrance des personnages – et même comique – à travers l’accumulation gore et excessive des blessures infligées aux deux guerriers, qui par son absurdité irréaliste va jusqu’à provoquer le rire de Sandor. La mort est impossible, et pourtant elle reste constamment présente. Les chutes de pierre et la poussière donnent une impression d’ensevelissement des frères maintenus entre la vie et la mort, tandis que les flammes en contrebas se font de plus en plus menaçantes. Avec une forte ironie tragique, la chute finale des frères Clegane résout enfin leur haine réciproque déve­loppée depuis l’enfance, en les faisant sombrer ensemble dans le brasier de la ville. Si leur décès est alors donné comme une évidence, il n’est toutefois pas affiché, tant il semble impossible de les voir mourir « pour de bon ».

Il est d’ailleurs possible de s’étonner du nombre de fausses morts dans une série pourtant réputée pour son taux de mortalité. Certes, les chiffres le prouvent : l’espé­rance de vie d’un personnage de Game of Thrones est particulièrement limitée, ce qui entraîne un renouvellement fréquent du personnel narratif tout au long des huit saisons. Cette dynamique a d’ailleurs entraîné de nombreuses études sur la durée de survie des personnages et leurs risques de décès – avec des résultats bien souvent erronés22. Néanmoins, force est de constater que les sauvetages de dernière minute ne manquent pas et que les héros, eux, échappent systématiquement à la mort, re­nouant ainsi avec des codes narratifs traditionnels. Nombre de protagonistes survi­vent à des blessures supposées mortelles, certains par une intervention providentielle – Gregor Clegane, Béric Dondarrion –, d’autres par simple force – Sandor Clegane, Sansa Stark. Certains personnages sont même conservés en vie pour pouvoir être torturés par d’autres, comme Theon Greyjoy et Ellaria Sand. Enfin, Game of Thrones propose des exemples de permanence de l’esprit, à défaut du corps : Jaqen H’ghar et la Corneille à trois yeux ont la capacité de modifier leur apparence tout en conser­vant leur identité, si bien qu’ils paraissent échapper à la mort elle-même. Le sujet de l’impermanence de la mort est d’ailleurs au cœur de la série et de l’attaque des Marcheurs blancs : dans Game of Thrones, la véritable menace pour les personnages n’est pas tant la mort que son potentiel caractère éphémère.

Avant de mourir : arrêt sur image

Dès lors, comment représenter une mort omniprésente mais inefficace, qui demeurerait un danger suffisamment prégnant pour pousser à l’action, tout en ne constituant qu’une convention sans réelle conséquence ? Dans les séries médiéva­listes, ce compromis est atteint par le ralentissement de ce qui mène au décès. Au plus près du danger, face à une armée ennemie, avec de graves blessures ou encore dans les derniers instants de tension avant une exécution, la menace se fait plus intense, et a donc un impact plus fort sur l’action des protagonistes comme sur l’in­vestissement émotionnel des spectateurs. Les séries étendent au maximum ces séquences qui précèdent de peu la mort, au point parfois de retarder le décès effectif d’un personnage que l’on sait pourtant condamné. C’est le cas par exemple dans le tout premier épisode de Désenchantée, où l’héroïne, Bean, est contrainte d’épouser un prince inconnu, Guysbert, pour consolider une alliance politique23. Elle est sauvée – de façon tragique – quand son promis empale involontairement sa tête sur le trône constitué d’épées, dans une référence évidente à Game of Thrones. Malgré la vio­lence de l’accident, la scène est traitée sur le ton de la parodie. La gravité de la mort est atténuée par l’adoption du point de vue de Bean, qui se trouve libérée de son engagement matrimonial, ainsi que par le ralentissement burlesque du décès de Guysbert. En effet, même avec une épée plantée dans la tête, il lui faut plusieurs longues minutes pour réellement mourir. Là encore, la tonalité humoristique du programme pose un voile sur l’agonie du personnage : celui-ci ne semble étonnam­ment pas en souffrance, il continue de parler, et paraît même importuner les autres personnages, qui ont accepté sa mort bien avant qu’elle soit effective. Le même procédé apparaît déjà dans La Vipère noire, où le poison ingéré par les personnages prend plusieurs secondes pour agir, leur laissant un bref espoir de survie. L’un des hommes empoisonné tombe même comme les autres, puis se relève plein de vie, à la surprise générale, pour boire une nouvelle coupe – elle aussi mortelle24. Il renou­velle donc son geste, qui de simple ignorance devient une forme d’inconscience, et finit lui aussi par mourir.

Par cet effet de ralentissement, le décès de certains personnages – qui pourtant ne sera parfois que temporaire – peut occuper un épisode entier, voire plusieurs dans le cas de Jon Snow, dont la mort dans Game of Thrones s’étend de façon fragmentée sur trois épisodes25. Son assassinat est d’abord représenté, puis son corps est laissé en évidence pendant que ses proches – et le spectateur – tentent d’accepter sa dispa­rition, et enfin des rituels religieux permettent de repousser la mort entièrement en ressuscitant le personnage. Les réalisateurs insistent sur l’importance de l’événement en lui accordant un temps particulièrement long, tout comme celle du héros Ragnar dans Vikings. Sa mort est en effet diffractée en trois temps également, cette fois répartis sur trois saisons différentes et dans un but différent. Reprenant le topos de la fausse mort, le personnage orchestre d’abord de fausses funérailles chrétiennes lors du siège de Paris, faisant croire à son décès pour mieux attaquer les Francs26. Puis, il connaît sa fin véritable dans une fosse emplie de serpents, en écho aux sagas scandinaves27 : cet élément biographique étant connu du grand public, il ne peut pas véritablement être nié par la série. Mais le décès du personnage ne signifie pas sa disparition totale : sa présence marque encore de nombreux épisodes, et la séquence de son décès est même renouvelée bien plus tard, à travers les hallucinations de son ancienne compagne, Lagertha28. La répétition de sa mort sert alors à offrir un nou­veau point de vue au spectateur, en soulignant toutes les conséquences physiques et psychologiques que cet événement a eu sur Lagertha. Après avoir été lourde d’en­jeux politiques dans la narration, la mort est ici rejouée pour en montrer tout l’impact personnel sur le long terme. Une fausse mort, une mort effective et un écho de sa mort : Ragnar meurt à trois reprises, sans jamais disparaître tout à fait. Si, dans Game of Thrones et dans Vikings, la triple mort revêt des fonctions narratives différentes, elle insiste également à chaque fois sur le rôle central de ces héros, tant dans l’économie du récit que dans la production et la valorisation de la série.

Le processus de ralentissement de la mort du héros, qui confère dès lors à la scène une résonance tragique, appartient aux codes de tout récit épique – jusqu’à devenir parfois un cliché. Traditionnellement, un personnage d’arrière-plan connaît une fin expéditive, mais plus un personnage est important dans l’intrigue, plus son décès est lent. La série Galavant joue sur cette attente lorsque le héros, transpercé par une épée, est sur le point de mourir. Il est conduit auprès d’un soigneur qui rap­pelle que, dans ces circonstances, « time is of the essence »29. Pourtant, le soigneur se lance dans un numéro musical affirmant la nécessité d’agir vite et, ce faisant, ralentit toute intervention en privilégiant sa chanson. Galavant meurt bel et bien, mais est ramené à la vie peu de temps après, étirant là encore sa scène de décès sur tout l’épisode. La mort est retardée au maximum, parfois dans un excès absurde qui dédramatise la scène, puis provoque comme un arrêt de toute temporalité. Tant que le héros est mort, mais que son entourage conserve un espoir de le ressusciter, le temps est suspendu, pour réduire le décès du personnage à une simple parenthèse dans l’intrigue. La structure temporelle qui se dessine montre bien que la mort ne constitue à chaque fois qu’un obstacle temporaire. Si une part de cet éloignement de la mortalité peut être imputée à la nature humoristique de certaines productions médiévalistes, ce n’est pas toujours le cas : des œuvres au succès mondial comme Game of Thrones et Vikings jouent habilement avec la menace permanente de la mort, tout en repoussant toujours plus ses conséquences par un effet de suspension du temps. Malgré la violence du contexte médiévaliste, la résonance tragique de la mort est atténuée.

Pour en finir avec la mort

Dans les séries médiévalistes, c’est l’imminence de la mort ou, à défaut, ses conséquences pour les survivants, qui rythment la narration, plus que la mort elle-même. La possibilité de disparaître pour ainsi dire à chaque instant pousse les personnages à agir, et justifie dès lors le déroulement de l’intrigue. La forme sérielle incite à la fragmentation de la narration, ce qui implique de proposer des ressorts diégétiques suffisamment attrayants pour retenir le spectateur et créer une intrigue dynamique. La narration s’appuie alors sur la valorisation du moment de tension qui précède la mort. Les séries médiévalistes ne nient pas la mort, bien au contraire : il s’agit d’en montrer l’imminence et le caractère inéluctable, tout en repoussant au maximum ses conséquences. Puisque l’intrigue est régie par l’action – le combat, l’aventure, etc. –, la menace que constitue la mort doit rester un moteur sans jamais atteindre sa finalité. Comme le vieillard mis en scène dans Sacré Graal ! (1975) des Monty Python qui s’évertue à affirmer « I’m not dead yet! »30 à celui qui veut le déposer sur la charrette des défunts, les séries médiévalistes se situent dans cet entre-deux qui voit la proximité de la mort mais conserve un fort attachement à la vie. Dans un registre bien plus sombre, la série Kaamelott reprend cette logique en montrant toute la richesse narrative de personnages proches de la mort – que l’on croit déjà décédés ou qui luttent eux-mêmes contre la disparition –, et qui par définition n’ont plus rien à perdre. Alors que tous estiment que Lancelot, disparu depuis plusieurs semaines, est mort, le chevalier les corrige, comme une menace : « Pas encore. Pas tout à fait »31. C’est dans ce « pas encore » que se joue l’intrigue des séries médiévalistes, sur la conscience et le refus conjoints de la mort. Ces pro­grammes transposent dans leur narration le processus-même du médiévalisme, par lequel le Moyen Âge, pourtant dépassé depuis longtemps, refuse de disparaître mais continue au contraire d’être un moteur narratif.

1 Sur les liens et les divergences narratives et structurelles de ces deux médias, voir Jean-Pierre Esquenazi, Les séries télévisées : l’avenir du

2 Voir Claire Cornillon, Sérialité et transmédialité : infinis des fictions contemporaines, Paris : Honoré Champion, 2018.

3 Par souci d’allégement syntaxique, et en cohérence avec la terminologie en vigueur, l’adjectif « médiéval » est employé dans cet article pour

4 Sur le rapport des séries au temps, y compris dans les productions non-médiévalistes, voir la thèse de Vladimir Lifschutz, Les séries télévisées :

5 Joshua J. Mark, « Vikings TV Series – Truths and Fictions », 26 novembre 2018, consulté le 5 juillet 2019. URL : www.ancient.eu/article/1285/

6 Voir Shiloh Carroll, Medievalism in A Song of Ice and Fire and Game of Thrones, Cambridge : D.S. Brewer, 2018.Sur les questions du rapport au

7 Kaamelott, saison 3, épisode 10.

8 Ibid., saison 3, épisode 33, et saison 5, épisode 38.

9 Sur l’idée désormais nuancée d’un désintéressement parental au Moyen Âge, voir Philippe Ariès, L’Enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime

10 Galavant, saison 2, épisode 9 [Galavant : C’est un bon jour pour mourir. / Roi de Valence : On ne va pas mourir, il reste un épisode. / Galavant 

11 Kaamelott, saison 1, épisode 7.

12 Ibid., saison 1, épisode 21 et saison 4, épisode 1.

13 Ibid., saison 4, épisode 88.

14 La Vipère noire, saison 1, épisode 6 et saison 2, épisode 1.

15 Des rumeurs de reboot de la série paraissent régulièrement, comme de nouveau en juillet 2019. Si ce projet est chaque fois nié par les acteurs

16 Dans leur étude, Emory S. Daniel et David K. Westerman montrent que les fans de Game of Thrones expriment des sentiments forts vis-à-vis du décès

17 Emory S. Daniel Jr. et David K. Westerman, « Valar Morghulis (All Parasocial Men Must Die) : Having Nonfictional Responses to a Fictional

18 Galavant, saison 2, épisodes 6 et 8.

19 Kaamelott, saison 2, épisode 50.

20 Game of Thrones, saison 6, épisode 7.

21 Ibid., saison 8, épisode 5.

22 Voir Reidar P. Lystad et Benjamin T. Brown, « “eath is certain, the time is not”: mortality and survival in Game of Thrones », Injury

23 Désenchantée, saison 1, épisode 1.

24 La Vipère noire, saison 1, épisode 6.

25 Game of Thrones, saison 5, épisode 10, saison 6, épisodes 1 et 2.

26 Vikings, saison 3, épisode 10.

27 Ibid., saison 4, épisode 15. Voir Jean Renaud, Saga de Ragnarr aux Braies velues, suivie du Dit des fils de Ragnarr et du Chant de Kraka

28 Ibid., saison 5, épisode 18.

29 Galavant, saison 2, épisode 7 [le temps presse].

30 Sacré Graal ! [J’suis pas encore mort !].

31 Kaamelott, saison 5, épisode 50.

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Gilliam, Terry et Jones, Terry, Sacré Graal ! (Monty Python and the Holy Grail), Michael White Productions, National Film Trustee Compagny et Python (Monty) Pictures, 1975.

Groening, Matt et Weinstein, Josh, Désenchantée (Disenchantment), Netflix, The Curiosity Company et The ULULU Company, depuis 2018.

Handfield, Don et Rayner, Richard, Knightfall, History, A+E Studios, Midnight Radio, Stillking Films et The Combine, depuis 2017.

Hirst, Michael, Vikings, History, World 2000 Entertainment, Take 5 Productions, Shaw Media, MGM Television et Screen Ireland, 2013-2020.

1 Sur les liens et les divergences narratives et structurelles de ces deux médias, voir Jean-Pierre Esquenazi, Les séries télévisées : l’avenir du cinéma ?, Paris : Armand Colin, 2014.

2 Voir Claire Cornillon, Sérialité et transmédialité : infinis des fictions contemporaines, Paris : Honoré Champion, 2018.

3 Par souci d’allégement syntaxique, et en cohérence avec la terminologie en vigueur, l’adjectif « médiéval » est employé dans cet article pour désigner ce qui se situe à l’époque médiévale. Ainsi la « mortalité médiévale » est-elle la façon de mourir au Moyen Âge, les « parents médiévaux » sont-ils les pères et mères d’enfants vivant à l’époque médiévale, etc.

4 Sur le rapport des séries au temps, y compris dans les productions non-médiévalistes, voir la thèse de Vladimir Lifschutz, Les séries télévisées : une lutte sans fin, Lyon 2, 2015. Accessible en ligne : theses.univ-lyon2.fr/documents/lyon2/2015/lifschutz_v/pdf Amont/lifschutz_v_these.pdf.

5 Joshua J. Mark, « Vikings TV Series – Truths and Fictions », 26 novembre 2018, consulté le 5 juillet 2019. URL : www.ancient.eu/article/1285/vikings-tv-series---truths-and-fictions [Dans le but de créer un récit homogène et un arc narratif captivant, les événements historiques sont souvent condensés, combinés, compressés, sinon modifiés]. Toutes les traductions sont originales.

6 Voir Shiloh Carroll, Medievalism in A Song of Ice and Fire and Game of Thrones, Cambridge : D.S. Brewer, 2018. Sur les questions du rapport au temps et à l’histoire en fantasy, voir Anne Besson (dir.), Fantasy et Histoire(s), Chambéry : ActuSF, 2019, en particulier les articles de Viviane Bergue, « Primhistoire, temporalité cyclique et chronologie linéaire : le temps de la fantasy », p. 53-73 ; et Florian Besson, « Sortir des Moyen Âge imaginaires : le rythme historique de la fantasy médiévaliste », p. 171-193.

7 Kaamelott, saison 3, épisode 10.

8 Ibid., saison 3, épisode 33, et saison 5, épisode 38.

9 Sur l’idée désormais nuancée d’un désintéressement parental au Moyen Âge, voir Philippe Ariès, L’Enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime, Paris : Plon, 1960. Voir également Nicholas Orme, Medieval Children, New Haven : Yale University Press, 2001.

10 Galavant, saison 2, épisode 9 [Galavant : C’est un bon jour pour mourir. / Roi de Valence : On ne va pas mourir, il reste un épisode. / Galavant : Mais quand même, on pourrait mourir ! […] / Tous : C’est un bon jour pour mourir ! / Reine de Valence : Oh s’il vous plaît, on n’est pas dans Game of Thrones ! / Gareth : On va pas mourir. On va arrêter la chanson, se bouger le cul et se battre !].

11 Kaamelott, saison 1, épisode 7.

12 Ibid., saison 1, épisode 21 et saison 4, épisode 1.

13 Ibid., saison 4, épisode 88.

14 La Vipère noire, saison 1, épisode 6 et saison 2, épisode 1.

15 Des rumeurs de reboot de la série paraissent régulièrement, comme de nouveau en juillet 2019. Si ce projet est chaque fois nié par les acteurs, il n’empêche que cette possibilité confirme la capacité de la série à se renouveler sans cesse et à ne pas s’arrêter à la disparition de ses personnages.

16 Dans leur étude, Emory S. Daniel et David K. Westerman montrent que les fans de Game of Thrones expriment des sentiments forts vis-à-vis du décès du personnage de fiction Jon Snow, comme ils pourraient le faire face au décès d’un proche : des phases de déni, de colère, de négociation et de dépression alternent ainsi dans les commentaires du public sur les réseaux sociaux, et suggèrent l’importance de l’investissement émo­tionnel des fans dans le visionnage de la série.

17 Emory S. Daniel Jr. et David K. Westerman, « Valar Morghulis (All Parasocial Men Must Die) : Having Nonfictional Responses to a Fictional Character », communication research report, mis en ligne le 16 mars 2017, consulté le 12 juillet 2019. URL : www.tandfonline.com/doi/full/10.1080/08824096.2017.1285757, p. 8 [Contrairement à la mort réelle, il y a toujours des moyens pour faire revenir un personnage « mort » à la vie dans une série télévisée].

18 Galavant, saison 2, épisodes 6 et 8.

19 Kaamelott, saison 2, épisode 50.

20 Game of Thrones, saison 6, épisode 7.

21 Ibid., saison 8, épisode 5.

22 Voir Reidar P. Lystad et Benjamin T. Brown, « “eath is certain, the time is not”: mortality and survival in Game of Thrones », Injury Epidemiology, 2018, 5-44, mis en ligne le 10 décembre 2018, consulté le 9 juillet 2019. URL : injepijournal.biomedcentral. com/articles/10.1186/s40621-018-0174-7. Sur les prédictions de mortalité des person­nages, voir par exemple les travaux d’un groupe de chercheurs de la Technical Univer­sity of Munich, synthétisés dans le site got.show et notamment repris dans l’article de Will Bedingfield, « Who will die in Game of Thrones season 8 ? Science has the answer », Wired.co.uk, mis en ligne le 14 avril 2019, consulté le 12 juillet 2019. URL : www.wired.co.uk/article/game-of-thrones-season-8-predictions

23 Désenchantée, saison 1, épisode 1.

24 La Vipère noire, saison 1, épisode 6.

25 Game of Thrones, saison 5, épisode 10, saison 6, épisodes 1 et 2.

26 Vikings, saison 3, épisode 10.

27 Ibid., saison 4, épisode 15. Voir Jean Renaud, Saga de Ragnarr aux Braies velues, suivie du Dit des fils de Ragnarr et du Chant de Kraka, Toulouse : Anacharsis, 2005.

28 Ibid., saison 5, épisode 18.

29 Galavant, saison 2, épisode 7 [le temps presse].

30 Sacré Graal ! [J’suis pas encore mort !].

31 Kaamelott, saison 5, épisode 50.

Justine Breton

Justine Breton est Maître de conférences en littérature française à l’Université de Reims Champagne-Ardenne (INSPE de Troyes), et membre du CEREP. Spécia­liste de médiévalisme et de fantasy, elle étudie particulièrement les représentations audiovisuelles du Moyen Âge. Elle est l’auteur de Le Roi qui fut et qui sera. Repré­sentations du pouvoir arthurien sur petit et grand écrans (Classiques Garnier, 2019) et de Monty Python : Sacré Graal ! (Vendémiaire, à paraître en 2021). Avec Florian Besson, elle a également co-dirigé Kaamelott, un livre d’histoire (Vendémiaire, 2018) et corédigé Une histoire de feu et de sang. Le Moyen Âge de Game of Thrones (PUF, 2020).