La découverte des tropismes dans Enfance de Nathalie Sarraute

Noro Rakotobe D’Alberto

Citer cet article

Référence électronique

Noro Rakotobe D’Alberto, « La découverte des tropismes dans Enfance de Nathalie Sarraute », Tropics [En ligne], Hors-Série n°1 | 2014, mis en ligne le 01 décembre 2014, consulté le 21 décembre 2024. URL : https://tropics.univ-reunion.fr/312

L’enfance fascine Sarraute. Elle apparaît comme le temps de formation, l’origine de la sensibilité aux tropismes. Ces derniers constituent, selon la romancière, un ensemble de sensations non-verbales qui passent par les gestes, les regards ou qui sont encloses dans les mots dont il s’agit de déchiffrer les sens cachés. L’enfance constitue le moment où naît le « chercheur de tropismes »1. Il découvre la valeur de la communication non-verbale qu’il s’agit de saisir. Dans Enfance, le dialogue des voix narratrices permet d’explorer tous les méandres des significations de ces tropismes. À la recherche des sensations tropismales innommées, les personnages principaux d’Enfance se font herméneutes. Parlant des tropismes, la romancière souligne dans la préface de L’Ère du soupçon que son attention s’est fixée sur eux « depuis [son] enfance »2. Les tropismes sont présentés comme « la source secrète de notre existence »3. Ce qui est encore fécond, dynamique, ce qui recèle toutes les virtualités se rattache à l’enfance. Rien n’est encore fixé chez l’enfant, tout peut encore être modelé. Cette malléabilité, ce côté encore informe rapprochent l’enfance des tropismes. Sarraute considère l’enfance comme une période primordiale pour la formation de ces sensations qu’il s’agit de revivre « avant qu’ils disparaissent »4. Dans Enfance, l’autobiographie, on s’attachera à cerner comment cette exploration révèle la différence et la force transgressive du regard de l’enfant qui peut alors s’imposer comme une figure créatrice carnavalesque, celle qui permet d’inverser l’ordre des apparences, de renouveler le regard sur le monde. La représentation traditionnelle de l’enfance que nous décrirons dans un premier temps, cohabite dans un second temps avec une vision inhabituelle puisque l’autobiographie propose aussi la vision d’un enfant vu comme fou. Cette altérité dérangeante le projette in fine du côté de la création.

La représentation de l’enfance

Depuis Les Confessions5 de Jean-Jacques Rousseau, la place de l’enfant en littérature est bien établie. Les récits d’enfance constituent dorénavant un genre classique. Nathalie Sarraute elle-même y souscrit avec Enfance. Dans ce texte, elle obéit partiellement, comme le signale Philippe Lejeune, aux caractéristiques traditionnelles du genre6. La progression chronologique du récit qui accompagne Natacha des classes primaires jusqu’à l’entrée au collège, le thème de certains des épisodes traités tels que les promenades au parc7 ou le désamour envers la petite sœur constituent des topoï du récit d’enfance même si le traitement narratif, la polyphonie et la recherche des tropismes sont originaux. La représentation de plusieurs enfants reste également traditionnelle. Une importante galerie d’enfants parcourt l’autobiographie même si certains ne sont que des silhouettes. On trouve les camarades d’école, les enfants des autres immigrés russes. Ils sont en général pourvus d’une identité, d’un nom et d’un prénom. Et, s’ils ne font que passer, ils donnent une certaine épaisseur, une certaine drôlerie au récit. Lucienne Panhard, la fille de la tenancière de café, et quelques autres fillettes représentent l’univers du jeu, un univers douillet où des parents justes et bienveillants sont présents en arrière-fond pour entendre rire les enfants, les protéger. La mère de Lucienne veille à ce que la stricte égalité règne entre les deux petites filles qui veulent jouer à la serveuse. Les enfants de la tante Aniouta évoquent l’univers des petites filles en sabots de bois et robes à fleurs évoquées par la mère dans ses cartes postales. Ces tableaux se rapprochent de chromos colorés et ingénus. On trouve aussi des enfants issus du cercle d’immigrés russes parmi lesquels sont évoqués Boris et sa sœur Tania Péréverzev dont les fous rires marquent Natacha8. En dehors de Natacha, la narratrice, la plupart des enfants évoqués dans Enfance le sont de façon conventionnelle, positive. Ils sont joyeux et insouciants.

Quelques plus rares portraits d’enfants juste esquissés par petites touches servent de repoussoirs. Pierre Laran, l’enfant « très bien élevé » (E, 140), en fait partie. Il se conduit comme un adulte tout à fait comme il faut. Il ne brave jamais aucun interdit. Il constitue le parfait modèle de « celui qui s’aime »9. Cette catégorie de personnages que les narrateurs de Tu ne t’aimes pas évoquent construisent dès l’enfance une statue qui représente celui qu’ils veulent devenir plus tard. Ils figent en une forme fixe tout ce qui est à l’état encore informe. D’autres enfants sont présentés de manière négative. De la même manière, les deux petites filles, non nommées du fond de la classe, celles qui sont « un peu répugnantes, grossières, chuchotantes, ricanantes, malveillantes… » (E, 239) servent d’anti-modèles.

Mais au-delà de ces évocations de silhouettes très conventionnelles qui semblent sacrifier aux clichés du genre du récit d’enfance, la représentation traditionnelle de l’enfance comme d’un moment et d’un espace protégés est par ailleurs globalement mise à distance dans l’ensemble de l’œuvre de Sarraute, autobiographie comprise. Ces clichés de l’enfance heureuse sont le plus souvent renvoyés dans une sorte d’irréalité, celui d’un monde quasi onirique. Confrontée aux préceptrices anglaises de Lili dans Enfance, Natacha éprouve une nostalgie un peu fascinée face à « ces jeunes Anglaises candides, toutes fraîches écloses de leurs enfances champêtres de filles de pasteurs, d’instituteurs… des enfances qui n’avaient pu être que ce que sont les "vraies" enfances vécues dans l’insouciance, dans la sécurité, sous la ferme et bienveillante direction de parents unis, justes et calmes… » (E, 262). Ces enfances sont associées à une matière livresque, aux « nostalgiques et tendres récits » et aux « délicieux nursery rhymes et [aux] petits livres pour enfants destinés à Lili » (E, 263). L’univers sarrautien de l’enfance qui se donne à voir par le vécu de Natacha contraste en revanche avec ces images topiques. En dehors des silhouettes rapides de quelques enfants vus de l’extérieur dans des saynètes sommaires, l’enfance est aussi présentée comme un monde instable où l’enfant perçu comme fou fait l’apprentissage de l’altérité. Il doit conquérir un territoire propre.

L’enfant fou

Comme au Moyen Âge, dans un univers carnavalesque, l’action du fou par sa vision décalée renverse l’ordre des choses. Son geste provocateur peut occasionner un réveil salutaire. Pour Mikhaïl Bakhtine, les fous et les bouffons sont « les véhicules consacrés du principe du carnaval dans la vie courante […] Ils se [situent] à la frontière de la vie et de l’art (dans une sorte de sphère intermédiaire) pas plus personnages excentriques ou stupides qu’acteurs comiques10 ». La folie est perçue comme ce qui peut agir comme un « réactif11 » qui révèle de façon critique la vérité des choses. Elle est associée à une forme de lucidité. Hypersensible, l’enfant est relié au fou car il perçoit ce que les autres ne voient pas. Par sa vision particulière, son sens de l’irréel, le fou ouvre sur le monde de l’imaginaire à l’instar du poète comme dans la vision qu’en offrent les romantiques. La caractéristique fondamentale de Natacha, la fillette d’Enfance, c’est son esprit frondeur et ce que les adultes perçoivent comme sa folie. Dans l’épisode liminaire où elle déchire la soie du canapé, l’enfant souligne qu’effectuer l’acte interdit revient à « franchir le pas » (E, 12) qui sépare l’enfant dans la norme avec un esprit « net, propre, souple, sain » (E, 135) de l’ « enfant fou » (E, 135, 190), du « bébé dément » (E, 135). On peut être tenté de mettre ce récit en parallèle avec l’épisode canonique du peigne cassé dans Les Confessions de Rousseau, même si les visées et les modalités de l’acte sont autres. Chez Rousseau, le moment fondateur de la découverte de l’injustice et de la prise de conscience du règne des apparences rompt avec le temps serein du paradis de l’enfance. Dans l’autobiographie sarrautienne, l’épisode du canapé constitue aussi une scène inaugurale topique du récit d’enfance. La découverte de la force hypnotique que peuvent avoir certaines paroles, la première confrontation avec la folie constituent un point de bascule essentiel pour la formation de la personnalité de l’enfant. Au-delà des différences entre les deux scènes, l’acte de déchirer le canapé constitue, comme dans la scène rousseauiste du peigne cassé, l’équivalent symbolique d’une chute. Dans Enfance, provoquer12 et choisir d’agir en non-conformité avec ce qui est attendu est présenté comme l’action de « choir dans l’inhabité, dans le vide… » (E, 12) où le personnage est seul, en proie à l’angoisse.

L’enfant découvre l’univers de la folie qui double le monde plat et unifié des apparences. L’autobiographie décline de nombreuses transgressions qui permettent à l’enfant de se constituer un territoire propre qui le constitue comme un être autonome affranchi des normes, de la représentation et de la place offerte par les adultes. Déchirer le canapé, toucher le poteau malgré l’interdiction maternelle, affirmer que « maman a la peau d’un singe » (E, 99) ou décréter qu’elle est moins belle que la poupée du coiffeur revient à couper le cordon qui relie non seulement à la mère mais aussi à la communauté des gens perçus comme purs et sains d’esprit. Même l’épisode où, en conformité avec l’injonction maternelle, l’enfant mâche jusqu’à ce que l’aliment soit aussi liquide qu’une soupe offre une part transgressive. L’action obstinée qui constitue l’enfant en marginal et en fou n’obéit qu’à la lettre mais pas à l’esprit du message maternel. La fillette reconnaît que si sa mère était là, elle aurait oublié depuis longtemps la recommandation du docteur Kervilly et aurait versé dans l’insouciance. La crispation maniaque dont fait preuve l’enfant va à l’encontre de la légèreté maternelle. C’est une décision qui permet d’affirmer une place propre, à l’écart des autres enfants et à l’écart des conventions. La provocation constitue un outil qui questionne les apparences, les relations sociales et qui permet ainsi l’affirmation de soi. Mais par sa folie provocatrice, l’enfant sème le désordre. Cette posture qui consiste à affronter les marges en ne se conformant pas au regard, aux paroles et aux attentes d’autrui relie l’enfant à l’univers de la création.

L’enfant et la création

L’auteur des transgressions dans l’œuvre de Sarraute est présenté comme un inadapté. Le « chercheur de tropismes » est toujours mal vu par les autres. Selon Sarraute qui se réfère au personnage de Rudyard Kipling13, il peut agir comme un vrai « Enfant d’Eléphant »14. Le conte d’origine de Kipling raconte d’où provient la trompe de l’éléphant. Un enfant d’éléphant doté d’une curiosité hors norme assaille les autres animaux de la jungle de questions sur le fonctionnement du monde. Il accepte de se faire battre et maltraiter pour obtenir des réponses aux questions qu’il se pose inlassablement. Il affronte le regard malveillant des autres animaux au nom de la libido sciendi. Dans sa confrontation finale avec le crocodile qui finit par lui mordre le nez et par l’allonger de ce fait, il acquiert une trompe bien utile. Dans Enfance, les transgressions de Natacha se font tout autant en actes (déchirer le canapé) qu’en paroles et en pensées (dire que « "Maman a la peau d’un singe" », E, 99) par le biais des « idées ». La périphrase « avoir ses idées » désigne dans l’idiolecte sarrautien le fait d’être en proie à une obsession, une pensée souvent dérangeante qui colonise l’esprit, qui taraude et que les personnages ont du mal à déloger. Les « idées » ont partie liée avec la folie mais aussi à la création. L’enfant finit par les maîtriser et peut les convoquer ou les congédier à l’envi : « elles sont discrètes maintenant, les idées, elles ne font que me traverser, elles m’obéissent, c’est moi qui décide de les retenir, de les faire rester le temps qu’il faut, quand il m’arrive d’avoir envie de les examiner, avant de les congédier » (E, 136). Cette confrontation victorieuse avec la force déstabilisante des idées contribue à créer chez l’enfant le sentiment d’une « force que rien ne pourrait réduire, une complète et définitive indépendance » (E, 137).

La part de folie, les compulsions obsessionnelles naissent dans l’enfance et sont rattachées à la folie comme à la création. La vision de la folie est globalement positive. Accepter sa folie et revendiquer sa différence signe l’acte de naissance du créateur. Dans L’Ère du soupçon, le créateur authentique est assimilé à celui qui garde toujours une part de son enfance. C’est une vision traditionnelle mise en avant par les romantiques notamment. Cependant, chez Nathalie Sarraute, cette convention est dépassée par le fait que c’est l’enfant, le petit, ce qui est généralement minoré qui occupent in fine la première place et constitue l’essentiel, de manière carnavalesque :

[…] il peut arriver que des individus isolés, inadaptés, solitaires, morbidement accrochées à leur enfance, et repliés sur eux-mêmes, cultivant un goût plus ou moins conscient pour une certaine forme d’échec, parviennent, en s’abandonnant à une obsession en apparence inutile, à arracher et à mettre au jour une parcelle de réalité encore inconnue15.

La différence de sensibilité de l’enfant, la force transgressive qu’il manifeste renouvellent le regard et révèlent le monde. Dans Vous les entendez, Nathalie Sarraute associe le créateur à la figure du « doux maniaque16 ». Ce dernier se décline sous la figure générique et oxymorique de « tous ces vieux enfants extatiques penchés vers la terre, levés vers le ciel, cueillant du mouron, tendant leurs filets à papillons… » (744). Ce tableau nous rappelle la passion de Vladimir Nabokov pour la chasse aux papillons17. L’écrivain la présente dans son autobio­graphie, Autres rivages, comme une « obsession »18 qui pousse à s’isoler et à affronter l’incompréhension de ceux que cette manie heurte. Il raconte ainsi la culpabilité, « la honte et le dégoût de [soi-même] »19 que provoquent ce qu’il qualifie lui-même comme une « hâte hystérique »20. Pour s’adonner au bonheur de la parenthèse enchantée de la chasse, il décide ainsi d’abandonner le camarade pauvre et endeuillé venu tout spécialement pour le voir.

De manière générale, Sarraute note les sentiments ambivalents qu’entraînent l’altérité fondamentale de l’enfant et le rejet qu’il doit affronter. L’angoisse extrême côtoie la joie. On peut mettre en rapport cette dualité des émotions avec l’effervescence que provoque par exemple dans Enfance berlinoise de Walter Benjamin l’« éveil du sexe »21. La découverte fortuite de « la rue maquerelle »22 entraîne la « profanation du jour de fête »23, celui du Nouvel an juif où l’enfant doit rejoindre sa famille à la synagogue. La transgression provoque à la fois « une vague brûlante d’angoisse » et « une autre […] d’insouciance parfaite »24. La décision de ne pas s’adapter, de ne pas entrer dans un moule attendu fait souffrir l’enfant mais il libère en même temps et signe l’acte de naissance de l’individu créateur.

Dans Enfance, cette peur qui se double d’un sentiment d’exaltation se manifeste notamment lors de la confrontation avec les mots. L’in-fans, celui qui ne parle pas, vit dans le monde préverbal des sensations. L’enfant, présent dans chaque « chercheur de tropismes », se situe dans un univers qui n’est pas encore soumis à l’ordre des mots. L’enfance constitue le moment où le chercheur de tropismes se confronte aux mots comme à des présences étrangères, insolites25. Une fois adulte, un enfant subsiste toujours dans ces personnages créateurs qui s’amusent à décomposer, à démonter les mots, les situations pour voir ce qu’ils renferment. Les mots enveloppent des sensations à la manière de contenants. L’attention portée aux mots, l’initiation à cet univers particulier caractérisent aussi la formation de la personnalité de l’enfant, son accession à l’autonomie, à la construction d’un soi positif, valorisé car créateur, capable de déceler des trésors que les autres ne perçoivent pas. Dans Enfance, l’analyse du propos de Vera – « on t’a abandonnée », « Tiebia podbrossili » (E, 182) – manifeste ce processus. Les voix narratives évoquent « les richesses que [le] mot recèle » (E, 183). Si la fillette « n’en était pas émerveillée comme elle l’est » au moment de l’analyse quand elle a été percutée par la brutalité des mots pendant l’enfance, elle n’en a pas pour autant « perdu une parcelle » (E, 183). La violence du propos provoque la souffrance mais l’analyse de l’envers des mots apporte le contentement et permet de maîtriser la situation, de prendre de la hauteur de vue.

Les mots qui s’impriment dans l’imaginaire de l’enfant sont aussi ceux qui proviennent des livres. L’enfance constitue l’âge de la découverte fondatrice de l’univers des livres et de l’écriture. Cet émerveillement des premiers contacts avec le livre et avec la bibliothèque constitue un topos des autobiographies d’écrivain, qu’il s’agisse de celle de Rousseau, de Sartre, de Benjamin ou de Nabokov. Parmi les lectures d’enfance présentées dans Enfance, le roman de Mark Twain, Le Prince et le pauvre26 occupe une place prépondérante. Cette œuvre qui trace des sillons profonds chez Natacha présente aussi des figures d’enfants frondeurs qui se situent dans la transgression. De manière carnavalesque, le pauvre et le prince échangent leurs places. Cette action qui dérange renouvelle le regard et questionne l’ordonnancement du monde apparent. Pour Mikhaïl Bakhtine, inverser les apparences, introduire la folie dans le monde figé permettent « de s’affranchir de la mensongère "vérité de ce monde", afin de poser sur le monde un regard affranchi de cette "vérité" »27. L’autobiographie sarrautienne met en avant cette lutte constante pour se libérer de tout ce qui assignerait une place figée, et qui empê­cherait la mobilité créatrice. En parallèle avec la lecture, l’épisode de la rédaction scolaire ou l’écriture du cahier de roman permettent également une confrontation avec l’univers des mots qu’il s’agit cette fois-ci de manier, de déplacer et non uniquement de subir quand ils sont assénés par autrui.

Ainsi, l’enfant apparaît avant tout comme un « chercheur de tropismes », c’est-à-dire quelqu’un qui cherche à voir ce qui se cache sous la surface, qu’il s’agisse d’un canapé ou de mots. Le personnage hypersensible qui choisit de voir, de saisir ce que les autres ne perçoivent pas ou refusent de prendre en compte sous prétexte que ce serait malsain est souvent perçu dans l’œuvre sarrautienne comme un enfant, quel que soit son âge. La figure ambivalente de l’enfant se situe entre pur et impur. Le monde des commencements est associé au pur puisque l’enfant ressent intensément chaque expérience inaugurale et l’action de tout chercheur de tropismes consiste à tenter de vivre ou de revivre inlassablement avec la même intensité les sensations tropismales. Mais l’action déstabilisatrice de l’enfant le projette aussi du côté de l’impur. La violence de ses questionnements, l’étrangeté de certaines de ses actions aux regards des normes que la société pose dérangent. Par ce trouble qu’il apporte, l’enfant est pleinement créateur puisqu’il met en mouvement ce qui est figé et quasi-mort. Comme dans l’univers du carnaval, le fou abolit l’ancien ordre et apporte une force de vie qui renouvelle le monde.

1 Benmussa Simone, Nathalie Sarraute. Qui êtes-vous ?, Lyon, La Manufacture, 1987, p. 59.

2 Sarraute Nathalie, Œuvres complètes, Jean-Yves Tadié (dir.), Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1996, p. 1553.

3 Ibid., p. 1554.

4 Sarraute Nathalie, Enfance, Paris, Gallimard, « Folio », 1983, p. 9. Enfance est dorénavant noté E.

5 Autobiographie publiée en 1782.

6 Lejeune Philippe, Les Brouillons de soi, Paris, Seuil, 1998.

7 L’évocation des jeux au jardin du Luxembourg unissent ainsi de manière conven­tionnelle l’enfance de Jean-Paul Sartre évoquée dans Les Mots et

8 Le motif des rires incompressibles des enfants et adolescents sera retrouve dans Vous les entendez ? même si la dimension provocatrice s’ajoute

9 Sarraute Nathalie, Tu ne t’aimes pas, in Œuvres complètes, Jean-Yves Tadié (dir.), Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1996, p. 1160

10 Bakhtine Mikhaïl, L’Œuvre de François Rabelais et la culture populaire au Moyen Age et sous la Renaissance, Andrée Robel (trad.), Paris, NRF

11 Sarraute Nathalie, Le Planétarium in Œuvres complètes, op. cit., p. 463.

12 Rakotobe d’Alberto Noro, « "Je vais le déchirer", la provocation dans l’œuvre de Nathalie Sarraute » in La Provocation en littérature, Daniel

13 Kipling Rudyard, L’Enfant d’Éléphant, Charlie Meunier (trad.), Paris, Nathan, 1990.

14 Sarraute Nathalie, Paul Valéry et l’Enfant d’Éléphant, in Œuvres complètes, op. cit., p. 1521.

15 Sarraute Nathalie, L’Ère du soupçon in Œuvres complètes, op. cit., p. 1619.

16 Sarraute Nathalie, Vous les entendez in Œuvres complètes, op. cit., p. 744.

17 Walter Benjamin évoque aussi ce plaisir de la chasse aux papillons qui pousse l’enfant à sortir des sentiers battus, à fouler l’herbe ou les

18 Nabokov Vladimir, Autres rivages, Mirène Davet et Mirèse Akar (trads.), Paris, Gallimard, 1991, p. 160.

19 Ibid., p. 161.

20 Loc. cit.

21 Benjamin Walter, Enfance berlinoise vers 1900, op. cit., p. 33-34.

22 Ibid., p. 34.

23 Ibid., p. 33.

24 Loc. cit.

25 Walter Benjamin met en scène la découverte des mots notamment dans l’épisode de la « commerelle » (Enfance berlinoise, p. 46-49).

26 Twain Mark, Le Prince et le Pauvre, Marie-Madeleine Fayet (trad.), Paris, Gallimard, « 1000 soleils », 1980.

27 Bakhtine Mikhaïl, L’Œuvre de François Rabelais et la culture populaire au Moyen Âge et sous la Renaissance, op. cit., p. 58.

1 Benmussa Simone, Nathalie Sarraute. Qui êtes-vous ?, Lyon, La Manufacture, 1987, p. 59.

2 Sarraute Nathalie, Œuvres complètes, Jean-Yves Tadié (dir.), Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1996, p. 1553.

3 Ibid., p. 1554.

4 Sarraute Nathalie, Enfance, Paris, Gallimard, « Folio », 1983, p. 9. Enfance est dorénavant noté E.

5 Autobiographie publiée en 1782.

6 Lejeune Philippe, Les Brouillons de soi, Paris, Seuil, 1998.

7 L’évocation des jeux au jardin du Luxembourg unissent ainsi de manière conven­tionnelle l’enfance de Jean-Paul Sartre évoquée dans Les Mots et celle de Sarraute.

8 Le motif des rires incompressibles des enfants et adolescents sera retrouve dans Vous les entendez ? même si la dimension provocatrice s’ajoute dans le texte ultérieur.

9 Sarraute Nathalie, Tu ne t’aimes pas, in Œuvres complètes, Jean-Yves Tadié (dir.), Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1996, p. 1160.

10 Bakhtine Mikhaïl, L’Œuvre de François Rabelais et la culture populaire au Moyen Age et sous la Renaissance, Andrée Robel (trad.), Paris, NRF, Gallimard, « Bibliothèque des idées », 1973, p. 16.

11 Sarraute Nathalie, Le Planétarium in Œuvres complètes, op. cit., p. 463.

12 Rakotobe d’Alberto Noro, « "Je vais le déchirer", la provocation dans l’œuvre de Nathalie Sarraute » in La Provocation en littérature, Daniel Leuwers et Frédéric-Gaël Theuriau (dirs.), Paris, Le Manuscrit, « Recherche-université », 2009, p. 249-264.

13 Kipling Rudyard, L’Enfant d’Éléphant, Charlie Meunier (trad.), Paris, Nathan, 1990.

14 Sarraute Nathalie, Paul Valéry et l’Enfant d’Éléphant, in Œuvres complètes, op. cit., p. 1521.

15 Sarraute Nathalie, L’Ère du soupçon in Œuvres complètes, op. cit., p. 1619.

16 Sarraute Nathalie, Vous les entendez in Œuvres complètes, op. cit., p. 744.

17 Walter Benjamin évoque aussi ce plaisir de la chasse aux papillons qui pousse l’enfant à sortir des sentiers battus, à fouler l’herbe ou les fleurs, les yeux levés et le corps tout entier tendu vers la quête et la capture. (Enfance berlinoise vers 1900 in Sens unique précédé d’Une enfance berlinoise, Jean Lacoste (trad.), Paris, Maurice Nadeau, 1988, p. 23-25).

18 Nabokov Vladimir, Autres rivages, Mirène Davet et Mirèse Akar (trads.), Paris, Gallimard, 1991, p. 160.

19 Ibid., p. 161.

20 Loc. cit.

21 Benjamin Walter, Enfance berlinoise vers 1900, op. cit., p. 33-34.

22 Ibid., p. 34.

23 Ibid., p. 33.

24 Loc. cit.

25 Walter Benjamin met en scène la découverte des mots notamment dans l’épisode de la « commerelle » (Enfance berlinoise, p. 46-49).

26 Twain Mark, Le Prince et le Pauvre, Marie-Madeleine Fayet (trad.), Paris, Gallimard, « 1000 soleils », 1980.

27 Bakhtine Mikhaïl, L’Œuvre de François Rabelais et la culture populaire au Moyen Âge et sous la Renaissance, op. cit., p. 58.

Noro Rakotobe D’Alberto

Université de La Réunion