Tortues marines et écaille dans l’océan Indien occidental.
Données historiques et anthropologiques

Claude Allibert

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Claude Allibert, « Tortues marines et écaille dans l’océan Indien occidental.
Données historiques et anthropologiques », Tropics [En ligne], 15 | 2024, mis en ligne le 01 juillet 2024, consulté le 08 novembre 2024. URL : https://tropics.univ-reunion.fr/2951

Ce travail vise à tenter de localiser quelques secteurs de l'océan Indien occidental particulièrement sollicités ces deux derniers millénaires, à l'occasion de la capture des tortues marines, à évoquer les techniques de chasse et l'utilisation qui fut faite de l'écaille, mais aussi à présenter les rituels de sacrifice qui y ont été associés.

This article aims at trying to locate a few sections of the Indian Ocean where turtles were numerous for the last two millenia. The techniques that were used to capture them, what their scale was made use of. It also presents the ritual sacrifices associated to them.

DOI : 10.61736/ASYQ2677

De tout temps les hommes ont tenté d'exploiter au mieux leur environnement végétal comme animal. La littérature nous donne de nombreux exemples de cette traque permanente de l'animal utile à travers le monde et en particulier dans l'océan Indien. Aucune partie de l'animal n'est négligée, ivoire (appelé « dents d'éléphants » par les Chinois), « robes » des grands fauves (connus du seul nom de nimr par les Arabes qui les collectaient en Afrique de l'Est et s'en servaient sous les selles des chevaux), etc. Mais ce fut la tortue et ses précieuses écailles, disponibles sur de plus vastes territoires marins qui fut, au fil du temps, l'objet des prélèvements les plus étendus. Pour n'en prendre qu'un exemple, nous ne retiendrons que cette déclaration faite dans Les Merveilles de l’Inde1 :

Ils (les Waqwaq) répondirent que c’était parce qu’on trouvait chez eux (les Zendj) des produits qui convenaient à leur pays et à la Chine, comme l'ivoire, l’écaille, les peaux de panthères, l'ambre gris…

Lancienneté des captures

L'ancienneté des captures n'est pas toujours avérée comme le laisse percevoir la quasi absence de notifications du temps des époques égyptiennes. Pourtant les multiples descriptions d'autres animaux auraient pu nous faire attendre le contraire2.

À y regarder de plus près, les auteurs, entre autres Mabille qui étudia longuement les gravures de l'expédition de Hatshepsout au pays de Pount vers 1500 av. EC apportent la preuve que les carapaces de tortues faisaient bien l’objet de collectes.

Among the product of punt represented as piled beneath the sycamore is one named […] kash, followed by a curious determinative. It lies in three pieces, larger than the lumps of incense, and I take it to be so many turtoise shells.3

Toutefois, Stanley M. Burstein citant Agatharchides of Cnidus pense que le commerce de l'écaille ne se faisait pas encore au 2e siècle av. J.C.

The shells, which are bowl shaped, they use to sail across to the mainland, which they do to fetch water, and for shelter, placing them upright in the highest spots, so that nature seems to have granted them with one gift the satisfaction of many needs, for one and the same gift is their food, container, house and boat.4

À ma connaissance, une réelle étude de l'exploitation des tortues n’a pas encore été menée pour les siècles antérieurs. Elle s’imposerait non seulement pour connaître l’usage qui en fut fait mais aussi pour déterminer l’extension des aires de répartition, permettant ainsi une approche de la connaissance soit des échanges commerciaux entre collecteurs et acheteurs soit des limites géographiques atteintes par les premiers collecteurs sans intermédiaires locaux. Évidemment, la distinction entre les deux ne serait pas facile à établir vu la rareté des documents hors matériaux.

Les premiers textes et des indices toponymiques

L'intérêt que portèrent les hommes aux tortues tint particulièrement à leurs écailles, mais pas seulement. Les textes gréco-romains comme le Périple de la Mer Erythrée (entre 40 et 70 après J.C.) y font plus qu'une simple allusion :

(…plus au sud) se trouve le dernier marché de l'Azanie, appelé Rhapta, où il y a une grande quantité d'ivoire et d'écaille de tortue5.

Chami6 dit que Rhapta est à l'embouchure du Rufidji, dos Santos limite l'emplacement le plus au sud au Cap Delgado, vraisemblablement le cap Prason des Grecs.

Pline7 qui ne se prive pas de copier Agatarkhides (2e siècle av. EC) apporte quelques compléments

In the Troglodyte country there are tortoises with horns8 like lyres but moveable, which they use as oars when swimming This kind is called chelyon; it has a valuable shell, but is rare, because the Tortoise-eaters are afraid of the sharp rocks among which they live; and the Troglodytes whose coast they visit account them sacred?

Par ailleurs, une étude attentive des toponymes anciens attribués à diverses régions du canal de Mozambique apporte des précisions sur l’attention qu’on leur portait. On peut ainsi reconnaître la trace de la tortue dans son association au Tartare (lieu d'enfer et de ténèbres pour les Anciens)9. La mer des ténèbres s'associe donc à la « mer des tortues ». Le terme grec « tartaros »10, utilisé par Platon qui évoque déjà l'enfer se retrouve dans l'italien tartaruga désignant ce reptile. Les Arabes utiliseront ce terme de ténèbres pour nommer la zone au-delà du canal de Mozambique, mais ne semblent pas lui avoir associé le mot tortue.

Les Grecs se servent du mot prase pour nommer une région au-delà de Rhapta. Ce terme évoque une zone caractérisant la nourriture préférée des tortues comme Desanges11 l'a prouvé. Mare Prasodum Breves: met en valeur les plantes consommées (alsinae?) par les tortues marines dans le secteur où l’océan est de faible profondeur (breves). Praso12 est le nom de cette plante (Chatelain). Ces termes (Mare Breves Prasodes) ont été reconduits sur la carte A.C. Mullero Instructae Tabulae- Claudii Ptolemaei Géo13, mer de peu de profondeur où poussent ces « herbes ». Prasodu subsiste sur la carte de Cantino, 150214, qui l'a copié sans doute sur une carte tirée de la Géographie de Ptolémée. Il s'agit de ces hauts fonds où pousse cette plante dont la tortue chelonia mydas (tortue verte) est friande.

Pline15 a écrit « Regio amithoskutta (scata, scutta, scuta), damnia, mizi maiores et minores, drimati »16. Wissmann17, qui a su tenir compte de ces vers, n'a cependant pas compris que le terme amithoskutta comprenait le mot scutta, à savoir le mot carapace, écaille18, et a cru que c'était le mot Madagascar mal orthographié. En revanche, la détermination des autres mots semble envisageable : wamizi pour les îles Mizi Mrima (Mozambique) pour Drimati, Domoni pour Damnia, ce qu'avait approuvé Rotter19. Regio amithoskutta, signifie donc « région où l’on trouve l'écaille de tortue ». Le sens de amitho peut demander une interprétation. Ne s’agit-il pas du latin a (privatif) et de mito « légendes », ce qui signifierait « qui n’est pas une fable ». Des tortues de grande taille sont en effet signalées par Pline (livre IX) :

The Indian Ocean produces tortoises (testudines) of such a size that a single shell is enough to form a hut to live in, and the inhabitants of the islands in the Red Sea use them as boats.

Le canal de Mozambique constitue un lieu majeur selon Pline.

D'autres indices de noms de lieux faisant allusion aux tortues peuvent être relevés et retenus. Thevet20 prétend que Madagascar s'appelait Pacras, terme signifiant tortue selon lui (mais en quelle langue ?). Même si l'on doit se méfier des déclarations de Thevet, il n'en reste pas moins qu'il associe les tortues à ce terme et à l’île21. Nous retiendrons aussi le malgache I-harana : « où il y a de l'écaille » pour nommer la ville de Vohemar, (voir Dalmond22, Mundy23, Webber24, Poirot25, Vergnes26 et aussi Berthier). Flacourt27 donne osinkary pour la carapace de tortue, le caret s'appelant fanohara en malgache. Faut-il voir une influence de l'espagnol (ou plutôt du portugais) sur le malgache, ce qui indiquerait une intention commerciale ?

De quelques lieux de capture et les techniques utilisées

Si les lieux de capture souvent ne sont pas indiqués avec précision, la description de certaines régions peut apporter des indices, soit sur ces lieux mêmes ou sur ceux qui les nomment, si ce n’est sur ceux qui les emploient, l’emploi d’une langue n’étant pas à coup sûr la preuve qu’elle est utilisée par ses locuteurs initiaux, même si cela est assez probable.

Les types de tortues capturées peuvent aussi donner quelques indices du lieu de leur capture même s'il n'est pas précisé28. Ainsi, Eretmochelys imbricata, anciennement chelone imbricata qui ne mange pas d’algues mais des mollusques, des crustacés et des éponges (même vénéneuses) se trouve surtout au nord de Madagascar, aux Seychelles et à Aldabra. Elle vit en solitaire sur les côtes découpées en petites plages et sur récifs coralliens (vasières, falaises, rivages, îles, zones soumises à marée). Chelonia mydas, marine à écailles, tortue verte (ou franche) est abondante sur tout le Mozambique et Europa, grégaire et herbivore. Elle se nourrit de plantes fournies par la prairie qui tapisse les fonds marins de sa zone d’habitat (eaux moyennes et superficielles des mers et eaux côtières). Casson apporte des renseignements précis sur ces espèces pour l'époque du Périple de la Mer Erythrée :

Tortoise shell receives more mention in the PME than any other object of trade. It was exported by, or available at, ports in all the regions the author mentions (Red Sea, Adulis, Avalites, the horn and east coast of Africa, Socotora, southern coast of Arabia, India, Ceylon, Malay and Sumatra). Commercial tortoise shell today comes from a single source, the handsome shields of the hawsbill turtle (Eretmochelys imbricata), a large sea turtle, and is used mostly for smaller objects: combs, brushes, and personal adornments such as rings, brooches, and the like… The "genuine" tortoise shell is no doubt that of the hawksbill turtle, which is found in many waters, including the Red Sea29.

Les lieux de collecte et d'expédition de l’écaille sont en revanche mieux connus :

  • « L’écaille de tortue provient surtout de la côte orientale d'Afrique qui l’expédie à Fustat-Le Caire où des artisans (arabes) sont spécialisés dans la fabrication d'objets en écaille30 ».

  • Les Gréco-romains l’expédiaient à Adoulis (Mer Rouge) (Pline).

Les relations modernes nous font connaître que la tortue à écaille abonde toujours dans les eaux qui baignent la côte et les îlots aux environs de l'embouchure de l'Oufidji31.

L'écaille, au rapport d’Edrici, était la principale production de certaines îles peu éloignées de l'île el-Qomr. Elle peut se diviser en sept morceaux dont les plus lourds pèsent la moitié d'un mann. Elle est épaisse, transparente et bien variée dans ses couleurs32.

La recherche des tortues se poursuit au 13ème siècle. Horton tout de même dit qu'elle va décroissant. S'agit-il d'un constat d'épuisement des ressources ou une baisse d'intérêt ?33

Pour les siècles récents, les renseignements concernant la collecte et leur commerce ne manquent pas. En 1778, les Arabes amènent à Ngontsy34, île au nord de Madagascar, des noirs mozambiques pour les « vendre » (lire échange) contre de l’écaille. Du Maine35 déclare :

les Sakalava d'Ancara, de l'île de Nossé et d'Amouala font la pêche du caret sur ladite côte ainsi qu'aux petites îles qui l'avoisinent. L'écaille se vend aux Arabes de Mouzangaye qui vont eux-mêmes l'acheter en échange des marchandises de Surate, que les négociants Maures leur confient.

Passot36 signale des tortues en grande quantité à Mayotte et suggère que l’écaille puisse être exploitée. Gevrey37 y présente les tortues franches (chelonia mydas) et les carets (Eretmochelys imbricata). On notera la présence de ces deux tortues marines en un même lieu.

Pollen et van Dam38 indiquent que la zone est encore un lieu de production annuelle majeure de 3 000 kg en 1868, « The Arabs come each year with goods from Surat which they exchange for turtle shell »39 chez les Antankara.

Majunga est visité par différentes nations pour l'écaille de tortue40. Luis Mariano signale le grand nombre de tortues à la baie d’Ampasindava41. Balthazar Logo da Sousa (1557) déclara « les Maures vendent l'écaille de tortue aux Portugais »42. Bron de Vexela rapportait « Morondava was frequented by Antalaotse chelingues looking for tortoise shells »43.

Ces zones du canal de Mozambique ont attiré au fil des siècles des populations utilisant différentes techniques dans leur recherche de l’écaille. On peut lire dans Pline44 : « They are caught in many ways two men turn the creature on to its back, and the third puts a noose round it, and this it is pulled to the shore ». Le Périple de la Mer Erythrée signale que les nasses sont disposées entre les écueils à l'île de Menouthias45.

Une autre technique est également évoquée par Grottanelli46 à la côte de Somalia. La pêche au rémora est présentée comme la marque d'une influence austronésienne : dans ce cas, il y aurait eu une diffusion vers la côte africaine car on la retrouve aussi bien chez les Bajuini en Somalie qu’au Mozambique chez l'Ethiopia Orientale de Dos Santos47, mais aussi chez les Vézo48. Ph. Commerson au 18e siècle, Revoil (1888), Elliot (1925)) en font aussi mention. À Nosy Be, le rémora est appelé sucet49 et est conservé dans un baquet d’eau.50 Julien51 consacre deux pages à la capture. On trouve aussi la pêche au harpon à Vohémar : un feu est allumé dans une vieille carapace à bord du bateau pour attirer la tortue qui est harponnée52.

Des informations historiques qui affirment lextension de la diffusion de lécaille des tortues de locéan occidental

Smidt53 rappelle que Höllmann (1992, 411) signale dès les Han (206. BC-220 AD) le commerce de l'écaille qui sera également indiqué comme transporté par le royaume de Huang-tchi (censé être une déformation d’Agazi), royaume d’Erythrée (voir Hermann A., 1913, 553). Duyvendak54 signale également ce déplacement des Chinois dans ce but commercial. Chao Ju-kua (13e siècle) constate l’épaisseur de l'écaille de tortue de Berbera : « the land is rich of tortoise-shell of extraordinary thickness, for which there is great demand in other countries »55.

Pour Coedès56 :

les annales de la dynastie de Han parlent d'une ambassade venue de Tatsin (l'Empire Romain) de la part de l'empereur An-toun (Marc-Aurèle Antonin) (en 166). Il n'est pas sûr qu'il y ait eu à proprement parler une mission diplomatique ; mais qu'un marchand romain se soit réclamé de son empereur et se soit donné les allures d'un ambassadeur, il n'y a rien là qui doive surprendre.

Janvier57 rajoute

Il est… (seulement) possible qu'une partie de l'écaille de tortue, si souvent mentionnée dans le PME, denrée qui était commercialisée autour de l'océan Indien et jusqu'en Chine et qui transitait ainsi dans les circuits commerciaux de l'empire romain, provînt d'animaux capturés à Madagascar ou dans ses eaux, sans que ses transporteurs romains en connussent l'origine exacte.

On est dès lors en droit de se poser la question de l'usage qui put être fait en d'autres parties de l'océan Indien de cette écaille recherchée et exportée par les Arabes pour faire des peignes selon Masudi58 mais aussi par les Wakwak59 dont al-Idrisi dit « ils se nourrissent de poissons, de coquillages et de tortues de mer »60. Il est bien possible qu'il s'agisse des populations de Madagascar du fait qu’al-Idrisi reprend la carte de Ptolémée. Sur une carte fermée avec une lecture cursive, il n’y a guère d'autre solution.

Quelques utilisations qui en furent faites

Les auteurs grecs et arabes apportent de nombreuses indications. On en fait des objets : « The Greeks and Romans… used it above all for large objects, for veneering beds, sideboards, dining couches, doors, etc. »61. Blümmer62 avait déjà évoqué cette utilisation commerciale en vue de décoration pour l’ameublement63. Vallet signale aussi dans les documents de la Geniza : « it appears more discreetly, used to make combs or to decorate jewellery or boxesand in the yemenite sources it is mentioned by the arabic named abal ».

Évidemment, il ne faut pas oublier de noter le rôle alimentaire important que tint la viande de tortue pour certaines populations, rôle nullement tenu chez les Arabes64 pour des raisons religieuses, mais signalé par Idrisi dans l'ensemble waqwaq qu'il situe au sud de l'Afrique orientale.

Les relevés archéologiques à Dembeni65 confirment la consommation de la viande de tortues marines. On connaît l'utilisation de cette viande, protection contre le typhus. à bord des bateaux par les navigateurs austronésiens, à l'occasion des traversées du Pacifique.

Des usages médicinaux utilisant l'écaille de tortue ont été signalés par Vallet66. L'écaille est importée à Aden aux 13e et 14e siècles : « in his apothecary's treatise, he (al-Muzaffar Yusuf) also mentions the prophylactic qualities (against lice) and cautering effect, when the shell, reduced to ash, is mixed with egg white » (dans la Geniza, 13e siècle).

Elle joue aussi un rôle magique, en d'autres régions. En Chine par exemple, l'écaille avait un pouvoir divinatoire :

La civilisation de la Chine classique signale l'utilisation de l'écaille de tortue pour la divination. L'écaille était percée par une tige de métal rougie et les effets inscrits dans l'écaille étaient lus et interprétés.67

Les peignes en cette matière possèdent un pouvoir magique. L'écaille assure une longue vie au Japon, tout en étant un moyen de détecter le poison : “tortoise shell was believed to be able to detect poison68 (comme la corne de rhinocéros qui noircissent au poison en Chine)69.

On écrivait aussi sur le plastron de la tortue. L'utilisation de la tortue à cet effet remonte à des temps fort anciens70.

Il existe aussi des pratiques relevant de rituels. Chez les Vezo, à Madagascar,

Toute prise de fanu (tortue fano), en mer, même si elle est involontaire, oblige le pêcheur à des pratiques rituelles »71 ; « Les tortues sont liées aux vurumbe (esprits de la vie) et l'on sait que, si les Vezo sacrifient une chèvre, ou exceptionnellement un bœuf, les offrandes sont isolées du sol, ou par des branches, ou en les accrochant à une fourche, ou en les plaçant dans l'anjumba72 » ; « Les hommes entaillent le plastron à coups de hache, commençant vers la tête…ils dépècent les tortues vivantes, en veillant à ne pas atteindre les organes vitaux, le cœur et l'aorte. Ils recueillent le sang comme ils peuvent, parfois avec les écopes, le versent dans des marmites… » ; « Les harponneurs placent les écopes pleines de sang, transversalement, sous la proue de chaque pirogue. Chacun d'eux enlève la partie avant du porte-harpon et la met dans une écope, avec ce qui servira à oindre de sang les pièces de l’embarcation consacrées aux dieux de la mer… le harponeur commence son onction de sang, veillant à ce qu'il pénètre bien dans la fente karetu, coule le long de la coque et tombe dans l'écope sans atteindre le sol, ce qui serait fâcheux »73.

Ce rituel sacrificiel du sang, vecteur de mise en relation avec les ancêtres, se retrouve chez les Betsimisaraka pour la chasse à la baleine74, mais aussi chez les Sakalava. Dandouau75 relate le sacrifice de la jeune fille suivi du badigeonnage des poteaux de la porte du mahabo avec ses seins découpés.

Ces rituels à Madagascar se retrouvent dans la capture des dugongs et la chasse à la baleine. Le sang est le principe vital convoyeur et pourvoyeur de sacré. C’est ce qui relie au divin, aux ancêtres. La couleur rouge est aussi le symbole du monde des forces sacrées. Les animaux marins comme le dugong et la tortue se substituent ainsi au zébu.

Brève conclusion

La gamme des utilisations de la tortue marine faites par les hommes montre l’importance que cet animal tint du matériel à l'immatériel, de l'alimentaire au rituel religieux en passant par l’esthétique. Il n'est donc pas étonnant de trouver sa trace dans des lieux et des temps différents.

En étudiant les allusions qui y sont faites dans les textes, peut-on les analyser comme un possible marqueur ethnique et culturel et discerner à travers elles les mouvements de populations qui en facilitèrent la diffusion. Mais les techniques de capture sont-elles un marqueur de ce type ? Cela put être possible, mais les mouvements de population en facilitèrent la diffusion. C’est probablement plus l'état de la mer (lagons, baies ou mer formée) qui détermine le mode de pêche plutôt que le groupe ethnique qui la pratique.

1 Buzurg ibn Shahriyar, in Claude Allibert,« Textes anciens sur la côte est de l'Afrique et l’océan Indien occidental », Travaux et documents n°8

2 En effet, la tortue ne semble pas avoir été l'hypostase d'un dieu. Voir P.-H. Boussac, « La tortue, le scorpion et le lézard dans l’Égypte ancienne 

3 E. Naville, 1894, « L’expédition de Hatshepsout. The temple of Deir el Bahari », in Allibert, 1990, p. 10.

4 S. M. Burstein, Agatharchides of Cnidus. On the Erythraean Sea, London, The Hakluyt Society, 1989, p. 8, note 1.

5 L. Casson, The Periplus Maris Erythraei, text with introduction, translation and commentary, New-Jersey, Princeton University Press, 1989, p. 61.

6 F. Chami, Zanzibar and the Swahili Coast from c. 30000 years ago, Dar es Salaam, E&D Vision Publishing, 2009, p. 208.

7 Livre IX, voir Huntingford G. W. B, The Periplus of the Erythraean Sea, London, The Hakluyt Society, 1980, p. 125.

8 Il s’agit des nageoires des tortues.

9 Voir le dictionnaire étymologique Larousse p. 715, qui fait de la tortue l’animal des ténèbres (Dauzat A., Dictionnaire étymologique de la langue

10 Qui se retrouve dans le terme italien tartaruga.

11 J. Desanges, Recherches sur l’activité des Méditerranéens aux confins de l’Afrique (VIème siècle avant J.-C.-IVe siècle après J.C). Thèse présentée

12 E. Chatelain, Lexique latin-français, Paris, Hachette (5e éd.), 1893, p. 612 : « Prason » : arbuste de mer semblable au poireau. prasinus : vert

13 Voir Kammerer, Essai sur l’Histoire antique d’Abyssinie. Le royaume d’Aksum et ses voisins d’Arabie et de Meroe, Paris, Librairie orientaliste Paul

14 Voir la carte 53 de l’atlas de Grandidier A., Histoire physique, naturelle et politique, vol 1 : Géographie physique et astronomique, Atlas, 1re

15 Pline l’ancien (Caius Plinius Secondus), Histoire Naturelle (traduction française), Les Belles Lettres., 1947, 6, 152.

16 Le Gaffiot ne sait pas traduire et, pour chacun de ces termes, renvoie à l’Arabie (régions ou ville d’Arabie).

17 H. Wissmann, 1968, “Zangenae”, in Paulys Realencyclopädie der Classischen Altertumswissen, Suppl.-Bd. 11, 1968, p. 1337-1348.

18 Scutum : zoologie scute, shield plate or scale, piece of bony armour in crocodile, turtle, etc. Grec : skutos (hide) cog. sky. (in Concise Oxford

19 G. Rotter, Muslimische Inseln vor Ostafrika. Eine Arabische Komoren-Chronik des 19. Jahrhunderts. Herausgegeben, übersetzt und Kommentiert. Beirut

20 R. Bour, Recherches sur des animaux doublement disparus : les tortues géantes subfossiles de Madagascar, Montpellier, École Pratique des Hautes

21 A. Grandidier et alii., Collection des Ouvrages Anciens concernant Madagascar, vol. 1, 1903, p. 124.

22 Abbé Dalmond, Vocabulaire et grammaire pour les langues malgaches sakalava et betsimisatra, Ile Bourbon, imprimerie Lahuppe, 1842, p. 30 : écaille

23 L. Molet et A. Sauvaget, « Les voyages de Peter Mundy au XVIIe siècle », Tananarive, Imprimerie Nationale, Extrait du Bulletin de Madagascar, mai

24 Webber Rév. Père P. J., Dictionnaire français-malgache, Ile Bourbon, Notre Dame de la Ressource. Édition de 1855, p. 794 : tortue de mer : fano, d’

25 G. Poirot, Pré-dictionnaire vezo-français, Paris,DEA, CEROI-INALCO, 1993, p. 107 : hara: carapace, corail, grand rocher, roche coralienne;

26 Ch. Vergnes, « La pêche à la tortue dans la province de Vohemar », Bulletin Économique de Madagascar et dépendances, n°1, 1er trimestre, 1902

27 Flacourt, Histoire de la grande Isle Madagascar, [1661], Paris, Karthala, 2007, p. 553.

28 Voir R. Decary, La faune malgache, Paris, Payot, 1950 et R. Bour, Recherches sur des animaux doublement disparus : les tortues géantes subfossiles

29 L. Casson, The Periplus Maris Erythraei, text with introduction, translation and commentary, op. cit., p. 101-102.

30 M. Lombard, L’Islam dans sa première grandeur, Paris, Champs Flammarion, 1971, p. 209.

31 L. M. Devic,Le pays des Zendjset la côte orientale d'Afrique au Moyen-Âge d'après les écrivains arabes, Paris, Hachette, 1883, p. 188.

32 Ibid., p. 187.

33 M. Horton indique les pour cent de 12 à 6% allant décroissant (M. Horton, Shanga. The archaeology of a Muslim trading community on the Coast of

34 Archives Grandidier, tirées des Archives Coloniales, île au large d’Antsiranana (Diego).

35 J. P. Dumaine de la Josserie, « Idée de la côte occidentale de Madagascar depuis Ancouala au Nord jusqu’à Morondava, désignée par les Noirs sous le

36 L. Passot, « L’île Mayotte », Paris, Revue coloniale (août), tome 3,1844, p. 450.

37 A. Gevrey, Essai sur les Comores, [1870], Antananarivo, Association Malgache d’Archéologie, 1980, p. 67.

38 Pollen et van Dam, Recherche sur la faune de Madagascar et ses dépendances d'après les découvertes de François P. L. Pollen Et D. C. Van Dam, Leyde

39 P. Vérin, The History of Civilisation in North Madagascar, Rotterdam/Boston, Balkema 1986, p. 323.

40 M. Guillain, Documents sur l’histoire, la géographie et le commerce de la partie occidentale de Madagascar, Paris, Imprimerie royale, 1845, p. 213.

41 Voir P. Vérin, The History of Civilisation in North Madagascar, op. cit., p. 201.

42 Dans A. Grandidier et alii, collection des Ouvrages Anciens concernant Madagascar, op. cit., p. 101.

43 P. Vérin, The History of Civilisation in North Madagascar, op. cit., p. 91.

44 Pline, livre IX in Huntingford, The Periplus of the Erythraean Sea, op. cit., p. 125.

45 La localisation de cette île évoquée également par la géographie de Ptolemée n'est pas assurée. Certains analystes comme Mauny, 1968 la situe à la

46 V. L. Grottanelli, Pescatori dell’ oceano Indiano, Rome, Cremonese, 1955, p. 116-126. Voir aussi P. Gourou, « L'homme et la tortue », L’Homme, 1964

47 Voir P. Poumailloux, Une étude raisonnée de la côte orientale d’Afrique à la fin du XVIe siècle à travers l’Ethiopia Oriental du Père Joao dos

48 Se reporter à J. et A. Pascal, « Notes sur la sorcellerie Vezo de la région de Morombe », Mémoires de l'ISM, série C, tome I, fasc. 1, 1952

49 R. Decary, La faune malgache, op. cit, p. 96.

50 Ibid.

51 Julien G., « Concepts sur le règne animal. Faune terrestre et faune marine », in Revue d’ethnographie et de traditions populaires, n°34-36 (2-4e

52 R. Decary, La faune malgache, op. cit, p. 96, ou sur la plage au lieu de ponte.

53 W.G.C. Smidt, « A Chinese in the Nubian and Abyssinian kingdoms », in Chroniques Yéménites [en ligne], 9 | 2001, http://journals.openedition.org/cy

54 J.J.L. Duyvendak, Chinese discovery of Africa,London, Probsthain, 1949, p. 13 et 21.

55 G.S.P. Freeman-Grenville, The East African coast: Selected documents from the first to the earlier nineteenth century, Oxford, Clarendon Press

56 G. Coedes, Textes d’auteurs grecs et latins relatifs à l’Extrême-Orient depuis le IVe s. av. J.-C. jusqu’au XIVe siècle, Paris, Ernest Leroux, 1910

57 Y. Janvier, « La géographie gréco-romaine a-t-elle connu Madagascar ? Le point sur la question », Omaly sy Anio (Antananarivo), n°1-2, 1975, p. 35

58 P. Pellat, Les prairies d’or, trad. Barbier de Meynard et Pavet de Courteille, Paris, Société asiatique, t. I et II, 1962-1965, p. 321.

59 Voir Viré, « L'océan Indien d'après le géographe Abû Abd-Allah Muhammad ibn Idris al-Hammûdî al-Hasanî dit Al-Sarîf al-Idrisi (493-560 H./1100-1166

60 Ibid.

61 L. Casson, The Periplus Maris Erythraei, text with introduction, translation and commentary, op. cit., p. 102.

62 C. Blümmer, Technologie und Terminologie der Gewerbe und Künste bei Griechen und Römern, Leipzig, Teubner, 1879, p. 375-379.

63 Voir J. Trinquier, « De la tortue marine à l'écaille. Un matériau “indien” de luxe romain », in Topoï Orient-Occident, 22 (1), 2018, p. 15-124.

64 Pierre Gourou (« L’homme et la tortue », op. cit., p. 114) précise toutefois que l’interdit alimentaire de la tortue n'est pas signalé par le Coran

65 C. Allibert, A. et J. Argant, « Le site de Dembeni (Mayotte). Mission 1984 », Études Océan Indien, Paris, INALCO, n°11, 1989, p. 63-172.

66 E. Vallet, « Reflections of the Periplus in Medieval Arab Sources; the case of Trade Products », in Periplus of the Erythraean Sea, op. cit., p. 

67 D. et V. Elisseeff, La civilisation japonaise, Paris, Arthaud, coll. les Grandes Civilisations, 1974, p. 144.

68 Mc Kinnon, in Beyond Serandib cité par Hirth F. et Rockhill W. W. (eds), Chau Ju-Kua: his work on the Chinese and Arab Trade in the twelfth and

69 Pour ce qui est de la corne de rhinocéros, Pelliot (signalé par G. Ferrand, Relation des voyages et textes géographiques arabes, persans et turks

70 Voir la photo “oracle bones, late Shang dynasty (ca. 14-11th c. B.C)”, in Anon, The National Palace Museum in Photographs, Taipei, Taïwan, 1987, p.

71 J. Faublée, Les esprits de la vie à Madagascar, Paris, Presses Universitaires de France, p. 88-99 et principalement p. 95.

72 J. Faublée, id., p. 93-94.

73 J. Faublée, id., p. 96. M. Angot (« L’exemple malgache », in Vie et économie des mers tropicales, Paris, Payot, p. 142-190) signale aussi la

74 G. Petit (« Les observations sur la pêche rituelle du dugong Madagascar », Paris, Bulletins et Mémoires de la Société d’anthropologie de Paris (

75 A. Dandouau, « Coutumes funéraires dans le Nord-Ouest de Madagascar », Tananarive, Bulletin de l’Académie Malgache, IX, 1911, p. 171-172.

1 Buzurg ibn Shahriyar, in Claude Allibert, « Textes anciens sur la côte est de l'Afrique et l’océan Indien occidental », Travaux et documents n°8, Paris, Institut National des Langues et Civilisations Orientales, Centre d’Étude et de Recherches sur l’océan Indien occidental, 1990, p. 74. Bien que l'attribution du texte à Buzurg ibn Shahriyar soit discutée (voir Jean-Charles Ducène, « Une nouvelle source arabe sur l’océan Indien au Xe siècle : le Ṣaḥīḥ min aḫbār al-biḥār wa-‘aǧā‘ibihā d’Abū ‘Imrān Mūsā ibn Rabāḥ al-Awsī al-Sīrāfī », Afriques [En ligne], 06 | 2015, http://journals.openedition.org/afriques/1746), l'information véhiculée est à retenir.

2 En effet, la tortue ne semble pas avoir été l'hypostase d'un dieu. Voir P.-H. Boussac, « La tortue, le scorpion et le lézard dans l’Égypte ancienne », in La revue scientifique, Paris, Édition de la Société anonyme française d'édition et de publicité, 10 octobre 1903, p. 467-469.

3 E. Naville, 1894, « L’expédition de Hatshepsout. The temple of Deir el Bahari », in Allibert, 1990, p. 10.

4 S. M. Burstein, Agatharchides of Cnidus. On the Erythraean Sea, London, The Hakluyt Society, 1989, p. 8, note 1.

5 L. Casson, The Periplus Maris Erythraei, text with introduction, translation and commentary, New-Jersey, Princeton University Press, 1989, p. 61.

6 F. Chami, Zanzibar and the Swahili Coast from c. 30000 years ago, Dar es Salaam, E&D Vision Publishing, 2009, p. 208.

7 Livre IX, voir Huntingford G. W. B, The Periplus of the Erythraean Sea, London, The Hakluyt Society, 1980, p. 125.

8 Il s’agit des nageoires des tortues.

9 Voir le dictionnaire étymologique Larousse p. 715, qui fait de la tortue l’animal des ténèbres (Dauzat A., Dictionnaire étymologique de la langue française, Paris, Librairie Larousse, 1938).

10 Qui se retrouve dans le terme italien tartaruga.

11 J. Desanges, Recherches sur l’activité des Méditerranéens aux confins de l’Afrique (VIème siècle avant J.-C.-IVe siècle après J.C). Thèse présentée devant l’Université de Paris IV (1976). Reproduction atelier de reproduction des thèses (Université de Lille III), 1982, p. 332.

12 E. Chatelain, Lexique latin-français, Paris, Hachette (5e éd.), 1893, p. 612 : « Prason » : arbuste de mer semblable au poireau. prasinus : vert, de couleur poireau (leek-green). Gaffiot F., Dictionnaire illustré Latin-Français, Paris, Librairie Hachette, 1934, p. 1234, donne « prason, zostère, plante marine ».

13 Voir Kammerer, Essai sur l’Histoire antique d’Abyssinie. Le royaume d’Aksum et ses voisins d’Arabie et de Meroe, Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 1926, carte n°1, entre pages 16 et 17.

14 Voir la carte 53 de l’atlas de Grandidier A., Histoire physique, naturelle et politique, vol 1 : Géographie physique et astronomique, Atlas, 1re partie, 1885.

15 Pline l’ancien (Caius Plinius Secondus), Histoire Naturelle (traduction française), Les Belles Lettres., 1947, 6, 152.

16 Le Gaffiot ne sait pas traduire et, pour chacun de ces termes, renvoie à l’Arabie (régions ou ville d’Arabie).

17 H. Wissmann, 1968, “Zangenae”, in Paulys Realencyclopädie der Classischen Altertumswissen, Suppl.-Bd. 11, 1968, p. 1337-1348.

18 Scutum : zoologie scute, shield plate or scale, piece of bony armour in crocodile, turtle, etc. Grec : skutos (hide) cog. sky. (in Concise Oxford dict., 12th édition, Oxford, Oxford University Press, 2006, p. 1117). Voir C. Allibert, « Navigation networks from the beginning of the Christian Era until the sixteenth century », in Re-evaluating in the Periplus of the Erythraean sea, ed. Boussac, Salles, Yon, New-Delhi, Manohar Ed., 2018, p. 326, déjà publié en français en 2012, reproduit in academia.

19 G. Rotter, Muslimische Inseln vor Ostafrika. Eine Arabische Komoren-Chronik des 19. Jahrhunderts. Herausgegeben, übersetzt und Kommentiert. Beirut in Kommission bei Franz Steiner Verlag, Wiesbaden, 1976, p. 24.

20 R. Bour, Recherches sur des animaux doublement disparus : les tortues géantes subfossiles de Madagascar, Montpellier, École Pratique des Hautes Études, Sciences de la Vie et de la Terre, Mémoires et Travaux de l’Institut de Montpellier n°19, 1994, p. 17.

21 A. Grandidier et alii., Collection des Ouvrages Anciens concernant Madagascar, vol. 1, 1903, p. 124.

22 Abbé Dalmond, Vocabulaire et grammaire pour les langues malgaches sakalava et betsimisatra, Ile Bourbon, imprimerie Lahuppe, 1842, p. 30 : écaille de tortue : ara « misi ara be an Nosi-Mitsin ».

23 L. Molet et A. Sauvaget, « Les voyages de Peter Mundy au XVIIe siècle », Tananarive, Imprimerie Nationale, Extrait du Bulletin de Madagascar, mai 1968, n°264, p. 39 du tiré à part. La carapace avec un blanc (non renseigné) et à droite, dans la marge, kindranoka, harana. Pour kindranony, Richardson donne (Rev. J. Richardson, A new Malagasy-English dictionary, Antananarivo, London Missionary Society (rééd. 1967), Gregg Press, 1885, p. 338) shell ou scale.

24 Webber Rév. Père P. J., Dictionnaire français-malgache, Ile Bourbon, Notre Dame de la Ressource. Édition de 1855, p. 794 : tortue de mer : fano, d’eau douce : réré, à écaille précieuse : fanohara. Dans l’édition de 1853, on lit page 261 : hara : feuille d’écaille mince qui recouvre la coque de la tortue.

25 G. Poirot, Pré-dictionnaire vezo-français, Paris, DEA, CEROI-INALCO, 1993, p. 107 : hara: carapace, corail, grand rocher, roche coralienne; harampano : carapace de tortue marine, haram-tsakafy : carapace de tortue terrestre).

26 Ch. Vergnes, « La pêche à la tortue dans la province de Vohemar », Bulletin Économique de Madagascar et dépendances, n°1, 1er trimestre, 1902, 75-77.

27 Flacourt, Histoire de la grande Isle Madagascar, [1661], Paris, Karthala, 2007, p. 553.

28 Voir R. Decary, La faune malgache, Paris, Payot, 1950 et R. Bour, Recherches sur des animaux doublement disparus : les tortues géantes subfossiles de Madagascar, op. cit., 1994.

29 L. Casson, The Periplus Maris Erythraei, text with introduction, translation and commentary, op. cit., p. 101-102.

30 M. Lombard, L’Islam dans sa première grandeur, Paris, Champs Flammarion, 1971, p. 209.

31 L. M. Devic, Le pays des Zendjs et la côte orientale d'Afrique au Moyen-Âge d'après les écrivains arabes, Paris, Hachette, 1883, p. 188.

32 Ibid., p. 187.

33 M. Horton indique les pour cent de 12 à 6% allant décroissant (M. Horton, Shanga. The archaeology of a Muslim trading community on the Coast of East Africa, London/Nairobi, British Institute in Eastern Africa, Memoir 14, 1996, p. 388).

34 Archives Grandidier, tirées des Archives Coloniales, île au large d’Antsiranana (Diego).

35 J. P. Dumaine de la Josserie, « Idée de la côte occidentale de Madagascar depuis Ancouala au Nord jusqu’à Morondava, désignée par les Noirs sous le nom de Ménabé », Annales des voyages, de la géographie et de l’histoire publiées par Malte-Brun, t. 2, 1810, tiré à part p. 22-23.

36 L. Passot, « L’île Mayotte », Paris, Revue coloniale (août), tome 3,1844, p. 450.

37 A. Gevrey, Essai sur les Comores, [1870], Antananarivo, Association Malgache d’Archéologie, 1980, p. 67.

38 Pollen et van Dam, Recherche sur la faune de Madagascar et ses dépendances d'après les découvertes de François P. L. Pollen Et D. C. Van Dam, Leyde, Chez J.K Steenhoff (E.J. Brill), 1868, p. 30.

39 P. Vérin, The History of Civilisation in North Madagascar, Rotterdam/Boston, Balkema 1986, p. 323.

40 M. Guillain, Documents sur l’histoire, la géographie et le commerce de la partie occidentale de Madagascar, Paris, Imprimerie royale, 1845, p. 213.

41 Voir P. Vérin, The History of Civilisation in North Madagascar, op. cit., p. 201.

42 Dans A. Grandidier et alii, collection des Ouvrages Anciens concernant Madagascar, op. cit., p. 101.

43 P. Vérin, The History of Civilisation in North Madagascar, op. cit., p. 91.

44 Pline, livre IX in Huntingford, The Periplus of the Erythraean Sea, op. cit., p. 125.

45 La localisation de cette île évoquée également par la géographie de Ptolemée n'est pas assurée. Certains analystes comme Mauny, 1968 la situe à la côte africaine, d'autres comme Horton (Horton M., Review of « The Periplus and East Africa », in Azania, vol. XXV, 1990, p. 98, et Horton M., Shanga. The archaeology of a Muslim trading community on the Coast of East Africa, op. cit., p. 453), y voit plutôt Madagascar dans la Géographie de Ptolémée. Voir aussi C. Allibert : « Dérive des toponymes de l’océan Indien : Évolution des localisations sur deux millénaires », à paraître.

46 V. L. Grottanelli, Pescatori dell’ oceano Indiano, Rome, Cremonese, 1955, p. 116-126. Voir aussi P. Gourou, « L'homme et la tortue », L’Homme, 1964, tome 4, n°3, p. 110-117.

47 Voir P. Poumailloux, Une étude raisonnée de la côte orientale d’Afrique à la fin du XVIe siècle à travers l’Ethiopia Oriental du Père Joao dos Santos, Paris, thèse soutenue à l’INALCO, CEROI, 2002, p. 239, le rémora est appelé sapi.

48 Se reporter à J. et A. Pascal, « Notes sur la sorcellerie Vezo de la région de Morombe », Mémoires de l'ISM, série C, tome I, fasc. 1, 1952, Tananarive, p. 18.

49 R. Decary, La faune malgache, op. cit, p. 96.

50 Ibid.

51 Julien G., « Concepts sur le règne animal. Faune terrestre et faune marine », in Revue d’ethnographie et de traditions populaires, n°34-36 (2-4e trim), 1928, p. 153-175.

52 R. Decary, La faune malgache, op. cit, p. 96, ou sur la plage au lieu de ponte.

53 W.G.C. Smidt, « A Chinese in the Nubian and Abyssinian kingdoms », in Chroniques Yéménites [en ligne], 9 | 2001, http://journals.openedition.org/cy/33

54 J.J.L. Duyvendak, Chinese discovery of Africa, London, Probsthain, 1949, p. 13 et 21.

55 G.S.P. Freeman-Grenville, The East African coast: Selected documents from the first to the earlier nineteenth century, Oxford, Clarendon Press, 1975, p. 21.

56 G. Coedes, Textes d’auteurs grecs et latins relatifs à l’Extrême-Orient depuis le IVe s. av. J.-C. jusqu’au XIVe siècle, Paris, Ernest Leroux, 1910, p. XIX, note 2.

57 Y. Janvier, « La géographie gréco-romaine a-t-elle connu Madagascar ? Le point sur la question », Omaly sy Anio (Antananarivo), n°1-2, 1975, p. 35, n.44.

58 P. Pellat, Les prairies d’or, trad. Barbier de Meynard et Pavet de Courteille, Paris, Société asiatique, t. I et II, 1962-1965, p. 321.

59 Voir Viré, « L'océan Indien d'après le géographe Abû Abd-Allah Muhammad ibn Idris al-Hammûdî al-Hasanî dit Al-Sarîf al-Idrisi (493-560 H./1100-1166) », Études sur l'océan Indien, collection des travaux de l’Université de La Réunion, 1984, p. 35. Rappelons que leur pays fait suite à Sofala.

60 Ibid.

61 L. Casson, The Periplus Maris Erythraei, text with introduction, translation and commentary, op. cit., p. 102.

62 C. Blümmer, Technologie und Terminologie der Gewerbe und Künste bei Griechen und Römern, Leipzig, Teubner, 1879, p. 375-379.

63 Voir J. Trinquier, « De la tortue marine à l'écaille. Un matériau “indien” de luxe romain », in Topoï Orient-Occident, 22 (1), 2018, p. 15-124.

64 Pierre Gourou (« L’homme et la tortue », op. cit., p. 114) précise toutefois que l’interdit alimentaire de la tortue n'est pas signalé par le Coran et pourrait être un interdit chez certains peuples avant leur conversion.

65 C. Allibert, A. et J. Argant, « Le site de Dembeni (Mayotte). Mission 1984 », Études Océan Indien, Paris, INALCO, n°11, 1989, p. 63-172.

66 E. Vallet, « Reflections of the Periplus in Medieval Arab Sources; the case of Trade Products », in Periplus of the Erythraean Sea, op. cit., p. 352.

67 D. et V. Elisseeff, La civilisation japonaise, Paris, Arthaud, coll. les Grandes Civilisations, 1974, p. 144.

68 Mc Kinnon, in Beyond Serandib cité par Hirth F. et Rockhill W. W. (eds), Chau Ju-Kua: his work on the Chinese and Arab Trade in the twelfth and thirteenth centuries, entitled “Chu-fan-chi”,
St-Petersburg, Publishing House of the Imperial Academy of Sciences, au sujet de Chau Ju-kua, 1911, p. 223, note.

69 Pour ce qui est de la corne de rhinocéros, Pelliot (signalé par G. Ferrand, Relation des voyages et textes géographiques arabes, persans et turks relatifs à l’Extrême-Orient du VIIIe au XVIIIe siècle, Paris, Leroux, 2 vol., 1914, p. 675, note sur la page 44 ligne 5 du texte de Sulayman [851]) signale le lien linguistique qui existe entre visana (corne) et visa (poison) et Ferrand conclut « La remarque est intéressante et l’hypothèse très vraisemblable ». La corne de rhino utilisée comme manche de couteau de table (selon une citation de Djayhani (vers 900), citée par Ibn al-Wardi) « devient humide et s’agite si les mets servis sont empoisonnés ». L’emploi actuel de la corne de rhinocéros comme aphrodisiaque est-il une fonction substitutive à cette première fonction purement protectrice pour se garantir de la mort, allonger la vie, voire ensuite la faciliter par cet effet médicinal prétendu, ou même, par son prétendu pouvoir aphrodisiaque, conserver les performances sexuelles (et donc procréatrices) de la jeunesse !

70 Voir la photo “oracle bones, late Shang dynasty (ca. 14-11th c. B.C)”, in Anon, The National Palace Museum in Photographs, Taipei, Taïwan, 1987, p. 51.

71 J. Faublée, Les esprits de la vie à Madagascar, Paris, Presses Universitaires de France, p. 88-99 et principalement p. 95.

72 J. Faublée, id., p. 93-94.

73 J. Faublée, id., p. 96. M. Angot (« L’exemple malgache », in Vie et économie des mers tropicales, Paris, Payot, p. 142-190) signale aussi la découpe avec le cœur palpitant, sans mise à mort préalable de la tortue. Voir aussi B. Koechlin, « Notes sur les implications de l’emploi de l’organe de la vue chez les Vezo et Mikéa du Sud-Ouest de Madagascar », Archipel 1, Études interdisciplinaires sur le monde insulindien, Paris, École Pratique des Hautes Études, 1971, p. 125.

74 G. Petit (« Les observations sur la pêche rituelle du dugong Madagascar », Paris, Bulletins et Mémoires de la Société d’anthropologie de Paris (séance du 1er décembre 1928), p. 250) signale cette information chez Le Gentil et Leguével de Lacombe reproduite dans Van Gennep A. (voir Tabou et totémisme à Madagascar, Paris, Leroux, 1904). Le Gentil (Voyage dans les mers de l’Inde. Tome 2, Paris, Imprimerie Royale,1781, p. 562) déclare également « le pêcheur de la baleine devait s'abstenir d'actes sexuels plusieurs jours ».

75 A. Dandouau, « Coutumes funéraires dans le Nord-Ouest de Madagascar », Tananarive, Bulletin de l’Académie Malgache, IX, 1911, p. 171-172.

Claude Allibert

Claude Allibert, archéologue et historien, est professeur des universités émérite. Auteur de six ouvrages, entre autres la réédition de l'Histoire de la grande isle Madagascar et Mayotte, plaque tournante et microcosme de l'océan Indien. Il a également commis une soixantaine d'articles. On lui doit le décryptage de récits merveilleux des auteurs anciens comme l'oiseau Rokh, l'arbre waqwaq (le cocotier) et le mot komr qui désigne la grande île sous les nuages de Magellan. Il a aussi apporté la preuve que Marco Polo avait bien pour partie désigné Madagascar dans son célèbre récit.